Reconduit à la tête du Fatah, Mahmoud Abbas se dit toujours prêt à négocier avec Israël

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Par le Monde – Piotr Smolar


Le président de l’Autorité palestinienne a défendu son bilan, mercredi 30 novembre, alors que son mouvement est en proie à de fortes tensions.

Un congrès tenu, c’est un congrès sans dissonance. Où les délégués reconduisent leur chef par acclamation, ou par « consensus » selon le vocabulaire des responsables du Fatah. C’est ainsi que le président Mahmoud Abbas a été confirmé à la tête de la principale composante de l’Organisation de libération de la Palestine, mardi 29 novembre. « Le Fatah, c’est la démocratie palestinienne », a osé à la tribune le coordinateur spécial de l’ONU pour le processus de paix, Nikolaï Mladenov. Mais derrière cette unanimité, la réalité est bien plus terne. Le spectacle offert par le congrès ressemble à une mise en scène d’un autre temps, ampoulée, à l’image du discours du président, qui s’est étiré sur près de trois heures mercredi.

Mahmoud Abbas a défendu son bilan à la tête de l’Autorité palestinienne, qu’il préside depuis 2005. Dénonçant toutes les formes de violence, il a souligné les avancées obtenues sur le plan international, avec l’obtention du statut d’Etat observateur non-membre aux Nations unies en 2012. Le raïs s’est montré d’une très grande prudence au sujet de la future administration Trump. « Nous ne savons rien de lui », a-t-il constaté. Le président a aussi répété sa volonté de surmonter les divisions avec le Hamas, maître de la bande de Gaza, et de tendre la main aux Israéliens pour une solution négociée au conflit. « Nous disons au peuple israélien que nous voulons la paix conformément aux résolutions internationales, mais c’est votre gouvernement qui ne veut pas », a-t- il lancé.

Se réunissant pour la première fois depuis 2009, le Fatah est confronté à une crise historique. Incapable de proposer un horizon à une population jeune et démoralisée par l’enracinement de l’occupation israélienne, la formation du président Abbas veut offrir des gages de renouvellement. Le congrès, qui dure cinq jours, doit permettre le renouvellement des membres de deux instances, le conseil révolutionnaire et surtout le comité exécutif, fort de 23 membres, où le président veut pousser ses partisans. Un numéro deux doit aussi être choisi.

Ce 7e congrès du Fatah est surtout l’occasion pour son leader de raffermir son contrôle sur les cadres, alors que les spéculations sur sa succession agitent Ramallah depuis des mois. Agé de 81 ans, Mahmoud Abbas cumule les fonctions de président de l’Autorité palestinienne, de chef de l’OLP et du Fatah. Le congrès rassemble près de 1 400 délégués venus de Cisjordanie, de la bande de Gaza et de l’étranger. M. Abbas s’est notamment démené afin que les membres du Fatah à Gaza puissent effectuer le déplacement. Mais ce sont les Israéliens qui ont bloqué la venue de plusieurs dizaines de délégués du territoire sous blocus. Le chef du bureau politique du Hamas, Khaled Mechaal, a fait lire un communiqué au congrès, pour exprimer le souhait de son mouvement de surmonter, sous conditions, les divisions internes palestiniennes.

La route est longue. Les partisans de l’homme d’affaires Mohamed Dahlan, exclu du Fatah en 2011 et contraint à l’exil, n’ont pas été conviés à l’assemblée. Depuis septembre, plusieurs d’entre eux ont été également exclus des rangs du parti. Ils ont tenté, le 29 novembre, de se rassembler dans le camp de réfugiés de Qalandiya, mais la police a empêché la tenue de la réunion. « J’ai reçu des messages d’officiers des services de sécurité, me disant de ne pas mettre le pied dans le camp et de faire profil bas », indique Dimitri Diliani, membre du conseil révolutionnaire du Fatah, exclu de la liste des délégués. Soutien de M. Dahlan, Dimitri Diliani réfute toute idée de scission au Fatah. Mais il annonce en même temps que les exclus se retrouveront « dans les deux semaines à venir quelque part dans la région pour mettre en place un plan d’action ».

La stratégie en question

Les pays du Quartet arabe (Egypte, Jordanie, Emirats arabes unis, Arabie saoudite) ont fait pression ces derniers mois sur Mahmoud Abbas afin qu’il accepte une réconciliation avec Mohamed Dahlan. La tenue du congrès du Fatah, à Ramallah, sans les partisans de M. Dahlan va provoquer de nouvelles tensions entre les pays arabes et M. Abbas, qui a décidé d’ignorer ce qu’il considère comme une ingérence. Depuis avril, Riyad a déjà cessé de verser près de 20 millions de dollars (18,9 millions d’euros) par mois.

Mais la question des cadres et de la compétition interne n’est pas la seule à se poser. De nombreux responsables du Fatah, conscients du discrédit qui touche leur organisation, voudraient une révision complète des institutions et de la stratégie, alors que se profile, en juin 2017, le 50e anniversaire de l’occupation.