Israël : 500 jeunes pousses spécialisées dans la voiture de demain

Share on facebook
Share on twitter
Share on linkedin
Share on print
Share on email

Le Figaro – par Marion Louis


L’État hébreu est en passe de devenir un passage obligé pour les plus grands constructeurs. Certains ont l’intention d’y ouvrir un centre de recherche et développement, d’autres ont noué des partenariats avec des start-up.

Les entrepreneurs israéliens raffolent de ce genre de paradoxe. Leur pays, dont la contribution à l’industrie automobile fut longtemps marginale, est en passe de devenir un passage obligé pour les plus grands constructeurs. Le récent rachat par l’américain Intel de Mobileye, pionnier de la voiture autonome, pour une somme record de 15 milliards de dollars, n’en est que l’exemple le plus spectaculaire. Au cours des derniers mois, l’allemand Daimler et l’Alliance Renault-Nissan ont tour à tour annoncé leur intention d’ouvrir un centre de recherche et développement en Israël – tandis que nombre de leurs concurrents y ont noué des partenariats avec des start-up engagées dans une rude compétition pour créer la voiture de demain.

Selon une étude publiée en décembre par le cabinet de conseil en stratégie Roland Berger, pas moins de 500 jeunes pousses israéliennes (soit environ une sur dix) sont spécialisées dans le transport électrique, la mobilité intelligente, de la voiture autonome ou dans la conception de pièces pour des véhicules conventionnels. L’investissement dans ces activités a atteint 1,6 milliard de dollars au cours des quatre dernières années. De son côté, Goldman Sachs estime que le marché de la voiture autonome atteindra 96 milliards de dollars en 2025. «Après l’ère des télécommunications, du logiciel ou du stockage de données, l’industrie automobile est un nouvel eldorado pour les entrepreneurs israéliens», assure Zohar Zisapel, récent fondateur d’Argus, jeune entreprise spécialisée dans la cybersécurité des voitures autonomes ainsi que d’une société qui développe des systèmes de guidage par laser (Innoviz).

Yossi Vardi, souvent présenté comme le «pape» des nouvelles technologies israéliennes, estime pour sa part que «le rachat de Mobileye va très probablement créer un élan et déboucher sur la création d’une véritable industrie liée aux véhicules autonomes et connectés ». Le succès de cette société, créé en 1999 et devenue le leader mondial des systèmes d’aide à la conduite, n’est qu’un exemple parmi d’autres.

L’application Waze s’est taillé un succès planétaire avec son système d’aide à la navigation reposant sur une analyse du trafic en temps réel, si bien que Google a déboursé, en 2013, 1,15 milliard de dollars pour se l’offrir. Moovit, qui propose une estimation des temps de trajet respectivement en transports en commun et en taxi, a pour sa part séduit de nombreux investisseurs dont les Français Keolis et Bernard Arnault. La société Gett, qui concurrence Uber sur le marché de la mise en relation entre les chauffeurs de taxi et leurs clients, a convaincu Volkswagen d’investir 300 millions de dollars dans ses projets. Le constructeur allemand a également acquis 40 % de CyMotive: cette start-up a été créée par Yuval Diskin, ancien patron du Shin Beth (le service de renseignement intérieur) afin de développer des systèmes garantissant la sécurité des systèmes informatiques qui seront utilisés à bord des voitures autonomes.

«Nous sommes en train de vivre un tournant, estime Boaz Memo, fondateur de l’incubateur spécialisé Drive. Après avoir hésité à s’engager dans ce secteur qui leur semblait profondément étranger, les jeunes entrepreneurs israéliens comprennent que sa transformation ouvre de vastes horizons.» Zohar Zisapel, qui travaille notamment avec Valeo, Peugeot et Renault, assure que le fossé entre grands constructeurs et créateurs de start-up se résorbe à grande vitesse. «Les acteurs traditionnels de l’industrie automobile, contraints de prendre des risques sous peine d’être marginalisés, commencent à se montrer plus flexibles et plus réactifs – tandis que nous apprenons à intégrer leurs exigences de sécurité et de fiabilité », résume-t-il.

Le groupe Renault-Nissan, qui avait créé il y a cinq ans un «laboratoire ouvert d’innovation» dans la Silicon Valley, vient d’en ouvrir un autre dans le centre de Tel-Aviv. «Cette nation jeune, ouverte sur le monde et contrainte de s’adapter en permanence face à l’adversité offre un écosystème idéal pour de grosses organisations dotées d’un authentique savoir-faire mais qui manquent de souplesse et ont souvent du mal à gérer la nouveauté», explique-t-on chez le constructeur français. Aiguillonné par les projets concurrents de Google ou d’Apple, BMW a de son côté noué en juillet un partenariat avec Mobileye et Intel dans le but de mettre au point, dans des laboratoires israéliens, une voiture autonome d’ici à 2021.