Terrorisme : l'armée face à ses nouvelles missions

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Par Le MONDE – Alain BARLUET


Confrontés à la menace terroriste, les militaires ont accru leur mobilité et leur efficacité dans les déploiements en France et à l’étranger.

Poursuite de « l’opération sentinelle », le grand retour des militaires sur le territoire national, amorcé dans le contexte des attentats de 2015, fait son chemin. En dépit des débats persistants sur sa pertinence et son efficacité militaire. À travers aussi des annonces qui devront se concrétiser pour ne pas rester en trompe-l’œil, telle la mise sur pied d’une «garde nationale», forte de 40.000 hommes en 2019 dans sa composante Défense (contre 28.000 aujourd’hui), alors que les obstacles à surmonter pour les salariés qui souhaitent rejoindre la réserve opérationnelle demeurent souvent dissuasifs. Il n’empêche, l’armée de terre – la principale concernée – «est de retour, et pour longtemps», se félicite un haut responsable militaire qui parle de 2016 comme d’une «année charnière, sur le plan des opérations, de l’organisation et des équipements». Après l’attaque de Nice le 14 juillet, le nombre de militaires déployés dans le cadre de «Sentinelle» est remonté à 10.000. Il est actuellement à 7.000, également répartis entre la province et Paris, ainsi que 3.000 en alerte. Surtout, pour durer, les militaires ont cherché à s’adapter à leurs nouvelles missions. Depuis cet été, un dispositif «dynamique», en patrouilles, s’est substitué à des gardes statiques. Une posture plus réactive, plus proche du métier militaire et donc bénéfique pour le moral des troupes. Sans compter que, cantonné à des gardes statiques, les militaires avaient aisément le sentiment de représenter des cibles «Dissuader, protéger, rassurer : les fondamentaux sont les mêmes mais nous le faisons différemment et de façon plus efficace» Le colonel François-Régis Jaminet.


Depuis le PC installé dans le Fort neuf de Vincennes, l’évolution de chaque patrouille est suivie en direct grâce au système de commandement Auxylium, actuellement en phase d’expérimentation. Chaque chef d’unité est muni d’un terminal et cet outil militaire permet une communication à tous les échelons et une coordination des forces. Au niveau de chaque arrondissement, les détachements «Sentinelle» s’adaptent aux événements particuliers: rentrée scolaire, événements sportifs, marché de Noël… En cas de problème, les militaires interviennent pour «figer» la situation, en attendant les forces de sécurité intérieures (police, gendarmerie…). Les règles de l’ouverture du feu s’inscrivent désormais dans le cadre de la légitime défense élargie au contexte, c’est-à-dire prenant en compte, par exemple, le «périple meurtrier» d’un attaquant armé.

Les difficultés liées au suremploi demeurent. «Être absent de chez soi 220 jours par an pour toucher le smic, c’est forcément un problème», convient une bonne source. Du côté de l’armée de terre, on ne constate toutefois à ce stade «pas de problèmes de recrutement ou de renouvellement de contrats». Le plein effet de la remontée des effectifs, attendu à partir de l’an prochain, et l’augmentation espérée du nombre de réservistes devraient permettre de retrouver un peu de souplesse. Pour les familles, – «le maillon faible», selon un chef militaire -, l’absence est plus mal vécue s’agissant d’un proche mobilisé à 300 kilomètres de chez lui que lorsque ce même militaire est déployé au Sahel… Du côté des politiques, principalement à droite, les candidats à la présidentielle ont tous critiqué, avec des arguments divers, les modalités du retour des militaires sur le territoire national, et parfois son principe même. La tendance est-elle réversible? «La remontée en puissance des effectifs «La remontée en puissance des effectifs a eu des effets structurants», sur lesquels il ne serait pas facile de revenir, estime un bon observateur. Certes, «Sentinelle», comme toute opération militaire, s’achèvera un jour. Mais le sillon creusé par l’armée s’annonce plus pérenne. Une tendance de fond prise en compte dans un document prospectif – «Action terrestre future» – que le chef d’état-major de l’armée de terre, le général Jean- Pierre Bosser, dévoilera ce jeudi à Satory. Un autre chef militaire évoque, pour sa part, le nécessaire retour à une «défense opérationnelle du territoire». Une notion qui remonte aux années 1970, à l’époque où il s’agissait de se préparer à défendre la nation contre les attaques des spetsnaz soviétiques…