Entre Israël et la Palestine, « nous avons besoin de mesures pratiques, pas de postures »

Share on facebook
Share on twitter
Share on linkedin
Share on print
Share on email
LE MONDE | 16.01.2017 à 10h01 • Mis à jour le 16.01.2017 à 10h31 | Propos recueillis par Marc Semo

Après la conférence de Paris pour la paix, le chercheur Michael Herzog estime que la situation va évoluer en fonction des choix de l’administration Trump.

Brigadier général de réserve et ancien responsable de la planification à l’état-major israélien, Michael Herzog est chercheur associé au Washington Institute for Near East Policy. Il a participé aux négociations de paix israélo-palestiniennes depuis 1993.


Comment jugez-vous la conférence de Paris ?

Les espoirs qu’y mettent les Palestiniens me semblent aussi exagérés que la peur des autorités israéliennes. Cette conférence, au mieux, ne peut avoir qu’un poids symbolique, celui de 75 pays affirmant en commun leur appui à la solution de deux Etats. C’est la seule solution. Mais le rappel de tels principes, aussi méritoire soit-il, n’aura aucun effet. L’enjeu, désormais, est ce que décidera de faire la nouvelle administration américaine et il n’y aura rien à attendre de l’ONU ces prochains mois. Le communiqué final ne dissuadera pas Donald Trump de poursuivre ses projets et les objectifs qu’il s’est fixés, même si nous ne les connaissons pas.


Comment voyez-vous le vote par le Conseil de sécurité, le 23 décembre 2016, de la résolution demandant l’arrêt de la colonisation ?

Le gel des implantations est dans l’intérêt même à long terme d’Israël et dans la logique de la solution à deux Etats. Israël ne devrait pas autoriser de nouvelles constructions dans les zones où nous supposons que sera établi un futur Etat palestinien. Mais c’est aussi une résolution très déséquilibrée qui fait faire un pas en arrière. Elle est ressentie comme telle par de nombreux Israéliens, y compris partisans de la paix, parce qu’elle considère comme faisant partie de la Palestine tout ce qui est au-delà des lignes de 1967, sans tenir compte, même a minima, des impératifs sécuritaires ou de sentiments historiques israéliens. Elle ne permettra donc pas de progrès. Nous avons besoin de mesures pratiques, pas de postures.


Comment relancer le processus de paix ?
Il faut agir et penser multilatéralement. Les pressions pour remettre à la table des négociations Israéliens et Palestiniens n’ont rien donné et elles ne pouvaient rien donner. Pour des raisons différentes, aussi bien Benyamin Nétanyahou que le président Mahmoud Abbas ne sont actuellement pas en mesure de prendre de grandes décisions. L’Autorité palestinienne est délégitimée, car il n’y a pas eu d’élection présidentielle depuis 2005 et d’élections parlementaires depuis 2006. Le premier ministre israélien, lui, est sous la pression du gouvernement le plus à droite de l’histoire du pays. L’administration américaine qui s’installe est une inconnue. Dans une telle situation, la seule chose possible est de garder les fenêtres ouvertes pour de futures négociations en faisant des petits pas concrets. Quels peuvent-ils être ? Il y a le gel des implantations, qui est, je le répète, dans l’intérêt d’Israël. Il est nécessaire, aussi, de donner des aides économiques dans les territoires palestiniens et de permettre une plus libre circulation des hommes comme des biens et des services. Il faudrait discuter d’un cessez-le-feu à long terme avec le Hamas et de la reconstruction de Gaza, en même temps que d’une coopération sécuritaire avec l’Egypte. Il faut, enfin, renforcer la gouvernance de l’Autorité palestinienne ainsi que la société civile.