Conférence pour la paix au Proche-Orient : Bilan d’un échec annoncé

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Dimanche 15 janvier, se tenait à Paris la Conférence pour la paix au Proche-Orient qui s’inscrivait dans le cadre de l’initiative française lancée le 3 juin 2016.

Le communiqué adopté le jour même, après huit heures de discussions, réaffirme le soutien de la communauté internationale à la recherche d’une solution au conflit basée sur le principe de « deux États vivant en paix et en sécurité ». « La base ce sont les frontières de 1967 et les grandes résolutions des Nations unies », a résumé Jean-Marc Ayrault. Le texte mentionne les principales décisions prises depuis cinquante ans par le Conseil de sécurité, de la résolution 242 adoptée au lendemain de la guerre de juin 1967, à la 2334, votée le 23 décembre dernier. Il fait par ailleurs référence aux paramètres définis par le secrétaire d’État John Kerry dans son discours du 28 décembre, ainsi qu’au rapport publié en juillet 2016 par le Quartet (États-Unis, Russie, Union européenne et Nations unies).

Mais l’absence des deux parties intéressées a inévitablement rendu vaine toute déclaration, tandis que la participation de pays qui pour beaucoup sont des ennemis déclarés d’Israël (la Ligue arabe et l’Organisation de la Conférence islamique qui ne reconnaissent pas le droit à l’existence de l’Etat d’Israël), les disqualifie d’emblée pour s’ériger en juge ou en arbitre alors qu’ils sont partie prenante. La nécessité de délivrer une déclaration commune et pertinente sous la pression d’une administration américaine en fin de mandat et à l’initiative d’un président français à bout de souffle, la présence d’acteurs aussi divers que la Russie qui a ses propres intérêts au Moyen-Orient où elle combat aux côtés de l’Iran pour soutenir le pouvoir de Bachar El Assad, mais aussi des principaux pays européens profondément divisés, ne pouvaient que laisser présager l’échec de cette conférence qui s’est tenue au mauvais moment, au mauvais endroit pour délivrer un mauvais message.


La conférence est survenue au mauvais moment …

La conférence s’est tenue à cinq jours du changement d’Administration aux Etats-Unis et est apparue comme un coup de force de la communauté internationale pour imposer une solution non pas par la négociation mais contre la négociation. Cet événement n’a fait que créer une situation de tension pour mettre sous pression Donald Trump et finir de miner le terrain politique et diplomatique au Moyen-Orient où règne déjà le chaos.

Au prétexte fallacieux que le conflit israélo-palestinien est « le père » de tous les conflits et que tous en dépendraient, les quelque 70 pays présents ont réitéré leur engagement en faveur d’une solution à deux États. Cette réunion internationale sans les Israéliens et les Palestiniens fut une fois encore un excellent moyen pour ces derniers de fuir la table des négociations. Prétendre faire avancer le processus de paix sans leur présence signait l’inutilité d’un tel événement.

D’ailleurs, à l’issue de la conférence, la Grande-Bretagne, qui n’a pas signé la déclaration finale, a fait part de son scepticisme à ce sujet : « Nous avons des réserves particulières sur une conférence internationale censée faire avancer la paix entre deux parties sans que ces dernières soient présentes, une conférence qui se tient en fait contre la volonté des Israéliens », a-t-elle indiqué dans un communiqué, précisant que pour cette raison, Londres avait participé avec un statut d’observateur.

Qui plus est, parmi les thématiques abordées, celui des incitations économiques suscite quelques interrogations car les financements en faveur de l’Autorité palestinienne sont déjà considérables ; cette dernière étant le premier récipiendaire au monde de l’aide budgétaire française. Quant à l’Union européenne, elle a versé depuis 1994 près de 6 milliards d’euros à l’Autorité palestinienne, tout en s’inquiétant de la corruption.

En somme, comme l’a déclaré le ministre israélien de l’Education Naftali Bennett sur son compte Twitter, cette conférence était « aussi inutile qu’un mariage sans la mariée ou le marié ».


… elle s’est tenue au mauvais endroit …

Le conflit israélo-palestinien ne peut se régler sur les rives de la Seine. Il s’agit d’un problème régional né du rejet d’Israël par le monde arabe et qui ne peut trouver sa résolution que dans le cadre régional qui l’a créé.

D’autre part, François Hollande, qui se trouve à 3 mois de la fin de son mandat et qui est dans l’incapacité de se représenter tant les divisions sont grandes au sein du Parti Socialiste et de la gauche, est peu légitime à intervenir dans le règlement du conflit israélo-palestinien sinon pour envenimer une situation qu’il a contribuée à aggraver en prétendant être médiateur, alors que depuis le mois de septembre 2014 il n’a raté aucune occasion de prendre fait et cause pour les Palestiniens contre Israël.

En effet, les 2 et 11 décembre 2014, l’Assemblée nationale et le Sénat ont voté des résolutions appelant le gouvernement à la reconnaissance unilatérale d’un Etat de Palestine qui n’existe pas. Le 31 décembre de la même année, la France a été le seul pays de l’UE à voter en faveur d’une résolution au Conseil de sécurité des Nations Unies qui prétendait imposer un agenda contraignant et des paramètres pour parvenir à un accord de paix. Le 16 avril 2016, la France a voté à l’UNESCO une résolution niant tout lien historique entre le peuple juif et le Mont du Temple avant de s’abstenir quelques mois plus tard devant le tollé général sur une résolution identique. Le 24 mai 2016, la France a une fois encore voté une résolution de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), intitulée « Situation sanitaire dans le territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et dans le Golan syrien occupé », qui condamne Israël pour avoir prétendument violé les « droits à la santé » des Syriens sur le plateau du Golan.

Le 24 novembre 2016, la France impose l’étiquetage des produits issus des implantations juives de Cisjordanie sur la base d’une réglementation européenne qui est pourtant non contraignante.

S’agissant de l’Assemblée générale des Nations Unies, 20 résolutions concernaient Israël cette année alors que seulement 6 étaient destinées aux autres pays. 38% des résolutions du Conseil des Droits de l’Homme des Nations unies ont été également dirigées contre Israël, le Conseil ayant un agenda où 10 questions sont examinées à chaque session dont une est spécialement réservée à Israël.

La diplomatie française n’a reculé devant aucune outrance pour satisfaire les exigences des ennemis d’Israël. C’est pourquoi, l’« alerte » lancée au monde par le président français est après la résolution 2334 le faux-pas de trop qui traduit un parti pris évident contre Israël, qui ne tient pas compte de la réalité et de la complexité du terrain dans une région déjà en proie à l’instabilité. Par cette diplomatie de l’absurde, qui contribue à délégitimer l’Etat d’Israël et à nier les droits du peuple Juif, le président Hollande affaiblit la voix de la France en laissant penser qu’il instrumentalise la question palestinienne à des fins de politique intérieure.

Alors que le niveau de confiance entre Israël et l’Autorité palestinienne est au plus bas en raison des nombreuses attaques terroristes qui ont frappé Israël depuis le mois d’octobre 2015 (46 personnes tuées, 649 blessés, 169 attaques au couteau, 103 tentatives, 126 tirs à l’arme à feu, 51 attaques à la voiture-bélier, une attaque à la bombe[1]), la communauté internationale peine à comprendre les critiques émises par Israël et le fait que le dialogue ne pourra reprendre que lorsque l’Autorité palestinienne condamnera ces actes terroristes et cessera de faire des terroristes des héros et des martyrs de « la cause palestinienne ».

Benyamin Netanyahou, qui a constamment rejeté l’initiative française, a dénoncé dimanche   « une conférence futile ». Il a prévenu par une allusion transparente à l’entrée en fonction imminente de Donald Trump, dont il attend visiblement une attitude plus complaisante:          « Nous vivons les derniers feux d’un monde ancien. Demain sera différent ». Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Emmanuel Nahshon, a lui déclaré que « cette conférence internationale et les résolutions de l’ONU ne font qu’éloigner les perspectives de paix car elles encouragent les Palestiniens à refuser des discussions directes avec Israël ».

En votant toutes les résolutions qui condamnent Israël, la France a capitulé face aux Etats antisionistes.


… et délivré le mauvais message.

Dans son discours de conclusion, le chef de la diplomatie française, Jean-Marc Ayrault, a rappelé que toute résolution du conflit devait se baser sur les « frontières de 1967 » et les grandes résolutions de l’ONU. Depuis des décennies en effet, les instances internationales perpétuent l’idée qu’Israël est une « puissance occupante » et figent la ligne de 1967 comme une frontière qui le prive de sa légitimité historique et politique. Cette volonté d’effacer toute présence juive des « territoires occupés » est discriminatoire et moralement répréhensible. Ainsi est créé un droit et une souveraineté palestinienne qui n’existent pas (tant qu’il n’existera pas d’Etat de Palestine) en inventant une frontière fictive (la « ligne verte » est une

ligne d’armistice, pas une frontière) qui sépare Israël des implantations. Israël « n’occupe » aucun territoire souverain et ne « colonise » pas plus ces territoires disputés que ne le font les Arabes ou les Palestiniens, qui du reste ne sauraient avoir plus de droits et de légitimité.

Si les paramètres de la négociation sont imposés, la paix n’est qu’une chimère. Pour être viables, l’ensemble des territoires palestiniens doivent être sous la responsabilité d’un gouvernement légal et légitime or, le mandat de Mahmoud Abbas, qui a commencé le 15 janvier 2004, aurait dû prendre fin au début de l’année 2009. Ce dernier a toutefois décidé de le prolonger d’une année supplémentaire, puis de sept autres. Il dirige, depuis, une nation fragmentée, sans la moindre légitimité, mise à part celle qu’il s’est lui-même conférée. Les élections générales qui auraient du avoir lieu ont sans cesse été reportées, faute de pouvoir être organisées dans de bonnes conditions et sans prendre le risque que le Hamas en sorte vainqueur.

***

La conférence de Paris visait à rappeler la nécessité impérative de sortir de l’actuel statu quo mais au-delà des déclarations bien-pensantes et déconnectées de la complexité du terrain et des enjeux sécuritaires, il n’en ressort qu’un laborieux compromis qui se réfère aussi bien aux recommandations émises en juillet 2016 par le Quartet sur le Proche-Orient qu’aux résolutions de l’ONU les plus pertinentes, dont la 2334, ce qui a satisfait notamment les pays arabes. Il intègre aussi une mention explicite des « principes » évoqués par John Kerry.

Si l’on doit résumer en quelques mots cette 2ème étape de l’initiative française, on peut dire qu’elle n’a fait que conforter les Palestiniens dans leurs revendications, encourager leur irrédentisme et les exonérer de toute concession et de tout compromis. A l’occasion d’une réunion du Conseil de sécurité de l’ONU mardi 17 janvier, l’ambassadeur de France François Delattre a affirmé qu’une nouvelle conférence serait organisée en 2017 pour continuer à raviver le dialogue sur le dossier israélo-palestinien. Si cet événement n’a pour autre ambition que d’être un réquisitoire contre Israël, la France se fourvoiera une fois de plus et perdra définitivement toute crédibilité sur la scène moyen-orientale.

[1] Chiffres de l’Ambassade d’Israël en France