Israël est soupçonné de poursuivre ses actions secrètes contre ce site, déjà frappé par plusieurs attaques.
Le site nucléaire iranien de Natanz, où sont assemblées les centrifugeuses d’enrichissement de l’uranium, est victime d’une étrange série noire. L’« accident » dans le circuit de distribution électrique, dont les officiels iraniens ont rendu compte dimanche en assurant qu’il n’avait fait aucune victime ni provoqué de fuites radioactives, aurait été causé par un acte de «terrorisme antinucléaire». La précision a été apportée par le chef de l’Organisation iranienne de l’énergie atomique (OIEA), après que les médias israéliens avaient déjà clairement laissé entendre qu’il pourrait s’agir d’une nouvelle cyberopération de sabotage contre un programme nucléaire présenté comme une menace potentielle pour l’existence de l’État hébreu.
Selon une stratégie de communication bien huilée, les dirigeants israéliens sont restés d’une extrême discrétion, refusant de confirmer ou de démentir les épisodes de la guerre de l’ombre que les deux pays se livrent. Ils ne font toutefois pas mystère de leurs intentions. « Il est clair qu’Israël a besoin qu’une option militaire (contre l’Iran) soit sur la table », a récemment réaffirmé Benny Gantz, le ministre israélien de la Défense, tandis que le général Aviv Kochavi, le chef d’état-major, a prévenu : « Nous allons continuer à agir avec force et discrétion. »

Seule certitude : Natanz constitue la cible privilégiée d’attaques à répétition, avec Israël dans le rôle du « suspect habituel ». Cette malédiction a commencé en 2007, lorsque le système électrique avait déjà été coupé, provoquant la destruction de centaines de centrifugeuses. Trois ans plus tard, un millier d’autres centrifugeuses avaient dû être mises à la casse par un virus informatique surnommé Stuxnet. Pour les experts, il ne fait aucun doute qu’il s’agissait d’un « coup » d’origine israélienne et américaine.
L’été dernier, une explosion s’est également produite dans l’enceinte du site. Dans un premier temps, les porte-parole iraniens ont évoqué un accident. Mais, samedi, le chef de l’Agence atomique iranienne, Ali Akbar Salehi, a changé de version et parlé d’« une explosion dans l’installation d’assemblage des centrifugeuses provoquée par l’ennemi ». Il n’avait pas précisé à quel pays il faisait allusion, mais le message était on ne peut plus clair.
Tensions maritimes
Ce nouvel incident survient à un moment particulièrement sensible. La nouvelle panne à Natanz s’est produite le lendemain des déclarations du président iranien, Hassan Rohani, qui s’était félicité du début de l’utilisation de gaz hexafluorure d’uranium, qui permet de produire du combustible pour les réacteurs et les armes nucléaires dans les nouveaux types de centrifugeuses. Ce procédé permet, selon le président, aux centrifugeuses d’être dix fois plus efficaces que les anciens modèles.
Cette annonce constitue une nouvelle violation de l’accord sur le nucléaire signé en 2015 par l’Iran et les grandes puissances. Trois ans plus tard, Donald Trump avait retiré les États-Unis de cet accord à la plus grande joie de Benyamin Netanyahou, le premier ministre israélien, qui n’a cessé de faire campagne pour son abrogation, soutenant que l’Iran, contrairement à ses engagements, poursuivait en secret, notamment à Natanz, un programme pour se doter de l’arme nucléaire. L’annonce sur les problèmes électriques du site a également eu lieu au moment où le « dossier » iranien était au centre des discussions avec Lloyd Austin, le secrétaire américain à la Défense, qui a effectué dimanche la première visite en Israël d’un membre important de la nouvelle Administration de Joe Biden.
Nul doute que Natanz a été évoquée, de même que les tensions maritimes qui menacent de dégénérer entre Israël et l’Iran. Des dizaines de bateaux iraniens transportant du pétrole ou des armes vers la Syrie pour aider le Hezbollah libanais allié de Téhéran ont été endommagés à l’aide de mines ou de missiles en mer Rouge ou en Méditerranée, tandis que deux navires israéliens ont été attaqués récemment dans ces eaux troublées.