«La police israélienne se prépare dorénavant à tous les scénarios de menace» – L’Opinion I Interview Pascal Airault

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«Nous n’avions pas préparé une pénétration d’une telle ampleur », reconnaît le directeur de la coopération internationale et de la sécurité de la police israélienne Micky Rosenfeld, en évoquant les attaques du 7 octobre

Israël a renforcé les mesures de sécurité à Jérusalem en prévision du mois du ramadan, qui débute ce lundi, afin d’assurer le bon déroulement des prières sur le Mont du Temple (l’Esplanade des mosquées pour les musulmans) et de prévenir les émeutes. Directeur de la coopération internationale et de la sécurité de la police, le commissaire Micky Rosenfeld revient sur l’évolution du dispositif sécuritaire israélien après l’attaque du 7 octobre.

La police israélienne prévoit-elle une hausse des tensions durant le ramadan ?
La police a fait une évaluation des questions de sécurité afin d’être en mesure de permettre à des dizaines de milliers de fidèles de célébrer le ramadan et de venir prier pacifiquement au Mont du Temple (NDLR : Esplanade des mosquées pour les musulmans). Nos agents travaillent avec les leaders de la communauté arabe afin de coordonner et de faciliter les célébrations. Au niveau technique, nous continuons la coopération avec les forces de sécurité de l’Autorité palestinienne pour faciliter les mouvements sur le terrain. Dans cette période de tensions, il est dans notre intérêt que les festivités se déroulent calmement et que des attaques du Hamas ne viennent pas perturber la fête religieuse. S’il y a des initiatives de soutien à l’organisation terroriste, des manifestations illégales ou des tentatives de provoquer des violences, notre police sera aussi prête à répondre et traiter ces incidents, quelle que soit leur ampleur.

Quelles leçons la police a-t-elle tirées de l’attentat du 7 octobre ?
Nous n’avions pas préparé une pénétra- tion d’une telle ampleur. Pour la première fois depuis 1948, une organisation terroriste a été capable de produire un massacre de masse sur notre sol. La police était préparée à plusieurs scénarios, particulièrement des possibilités d’infiltration de terroristes depuis la bande de Gaza. Mais, dans le pire des cas, nous envisagions des infiltrations de 20 à 30 terroristes. Nos unités ont été les premières à réagir, le matin même. Les unités de police tactiques, de lutte antiterroriste, de patrouille spéciale ont joué un rôle essentiel pour enrayer les mas- sacres du Hamas et éviter que les 3 000 Palestiniens infiltrés puissent atteindre le centre du pays, Tel-Aviv, la Judée et Samarie. Nous avons analysé et tiré des leçons de ces événements. Nous avons changé notre perception sur la manière d’opérer sur le terrain.

Comment de manière concrète ?
Nous avons amélioré notre coordination avec les forces de défense et le service de sécurité intérieure israélien (renseignement). Nous avons amélioré et renforcé nos unités tactiques, particulièrement pour réduire le temps de mobilisation. Nous avons acquis des munitions, de nouveaux équipements comme des véhicules anti-balles pour se projeter rapidement sur le théâtre de telles attaques. Nous avons enfin amélioré nos procédures de coordination avec les autres unités de défense nationale. La police israélienne, qui est en première ligne pour assurer la sécurité partout sur tout le territoire, est prête à faire face à toute menace comme celle du Hezbollah au nord et à gérer des scénarios compliqués, avec des attaques de roquettes et des infiltrations de cellules terroristes.

Selon vos rapports, les Palestiniens travaillant en Israël ont donné des informations au Hamas en vue du 7 octobre…
Les terroristes du Hamas connaissaient très précisément leurs cibles, le 7 octobre, comme la station police de Sderot, la ville d’Ofaqim… Ils s’étaient entraînés en consé- quence. Ils se sont iniltrés à travers 22 points différents. Tous avaient une feuille de route spéciique : l’assassinat de soldats, de femmes et d’enfants, la prise d’otages. Ils se sont ilmés avec leurs GoPro afin de diffuser les images de leurs actes horribles. Nos unités de police scientiique ont travaillé pendant des semaines pour identifier tous les corps, notamment ceux qui étaient calcinés. Ces éléments ont été rassemblés et diffusés par la voie diplomatique à des publics particuliers pour montrer l’horreur des crimes commis.

La police a-t-elle achevé ses enquêtes sur les abus sexuels commis sur des femmes ?
Nous continuons les enquêtes sur les souffrances infligées aux femmes, particulièrement les viols, à travers l’examen de leurs mini-caméras embarqués.

Allez-vous faire évoluer vos effectifs ?
Un des autres enseignements est que nous ne pouvons pas nous reposer simplement sur notre technologie. Le 7 octobre, certains de nos systèmes d’observation et de réponses automatiques ont été détruits. Nous devons donc compter beaucoup plus sur nos capacités humaines. Il n’y avait pas assez d’effectifs sur place. Il faut que nous soyons en mesure de déployer les unités adéquates au bon endroit et dans le bon temps. La police nationale compte 30 000 agents. Nous sommes en train de recruter pour grossir les rangs de nos unités de réponse rapide et des premiers rideaux de sécurité. Nous allons étoffer les 800 équipes de volontaires des différentes communautés en charge de la première protection du voisinage en coordination avec les unités locales de police. Nous multiplions les exercices et la formation afin de les préparer à toute menace. Le ministre de la Sécurité publique a également facilité l’acquisition de licences pour les armes à feu. Cela permettra d’accroître le niveau de défense des civils et de leur voisinage.

Nombre de policiers ont perdu la vie. Que faites-vous pour les familles de victimes et les blessés ?
Cinquante-neuf policiers ont été tués lors de l’attaque du 7 octobre et des jours suivants, 160 ont été blessés. Un policier a été assassiné et son corps enlevé. Nous avons la confirmation qu’il est détenu par le Hamas à Gaza. Nous supportons les familles des agents qui ont perdu leur vie. Nous les rencontrons régulièrement. Il est essentiel de leur montrer notre solidarité dans cette période diicile. C’est la plus grande perte pour la police israélienne depuis 1948. Nos agents peuvent aussi consulter des psychologues, particulièrement ceux qui ont assisté à des scènes horribles le 7 octobre. Parallèlement, nous devons nous assurer que le moral des agents reste élevé et qu’ils sont prêts à aller de l’avant, car la menace existe toujours. Nous devons être en mesure de faire face aux terroristes du Hamas, du Hezbollah, de l’Etat islamique.

Après avoir été en première ligne, comment la police vit-elle l’enquête ouverte par les autorités sur les allégations d’abus de ses agents contre des manifestants anti-Netanyahu ?
La police permet aux manifestations de se tenir, particulièrement celles des familles qui réclament le retour des Israéliens kidnappés par le Hamas. Nous appuyons la liberté de parole de ces familles dans ces moments difficiles. Mais des courants d’extrême gauche essayent de manipuler ces familles pour promouvoir leur propre agenda politique. Il y avait des consignes claires pour bloquer les routes et provoquer des perturbations publiques.