Révélations : un chercheur et un influenceur français, agents d’influence de la République islamique d’Iran

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Atlantico – Emmanuel Razavi


Dans le cadre de notre enquête au long cours sur les opérations d’ingérence de la République islamique d’Iran en France, notre reporter, qui est l’auteur du livre « la face cachée des Mollahs » (éditions du Cerf), s’est intéressé, après le parti communiste et La France Insoumise, au cas d’un intellectuel et d’un influenceur qui participent au récit apologétique du régime des mollahs, de sa force al Qods et de ses proxys terroristes. L’un oeuvre notamment au sein de l’école militaire, quand l’autre, issu des « quartiers », intervient en collège, entre deux voyages à Téhéran et Beyrouth.

Le 17 octobre dernier, une journée de conférences se tenait à l’école militaire, au sein de l’Observatoire des conflits du Centre d’études stratégiques – Terre, qui avait pour thème « la guerre pour Gaza ». Parmi les intervenants était présent Elyamine Settoul, docteur en sciences politiques habilité à diriger des recherches (HDR), spécialiste des phénomènes de radicalisation et maitre de conférences au Conservatoire national des arts et métiers. Charismatique, plutôt sympathique, celui-ci consacra une partie de son intervention au Hamas, s’interrogeant sur le fait que l’organisation palestinienne à l’origine du pogrom du 7 octobre 2023 soit qualifiée de « terroriste ». Il n’hésita pas, au passage, à faire une comparaison pour le moins singulière entre l’organisation terroriste palestinienne, et la résistance française.
Une mise en équivalence que l’on pourra juger banale par les temps qui courent, mais qui choquera la plupart des spécialistes. Le Hamas, parrainé par la République islamique d’Iran, auteur du pogrom du 7 octobre 2023 en Israël, est en effet inscrit sur la liste des organisations terroristes du conseil de l’Union européenne, du Canada, des États-Unis, ou encore d’Israël.

On peut bien considérer qu’Elyamine Settoul, éminent chercheur, a fait preuve de maladresse, voire d’un relativisme crasse durant son intervention, et que cela ne mérite pas davantage de commentaires ; le problème, c’est qu’il n’en n’est pas à son premier « essai » en matière d’indulgence envers l’islamisme pro-iranien.
Il est ainsi intervenu, le 2 janvier 2022, dans le cadre d’une conférence organisée en Suisse par l’association « Cri Voix Des Victimes », dont il est également le vice-président, et La Fondation Islamique et Culturelle d’Ahl El Beit (FICA) de Genève, dans un cadre pour le moins dérangeant.
Bien que le titre de cette conférence : « A-t-on vraiment vaincu le terrorisme ? », soit plus que convenu, l’association « Cri Voix Des Victimes », qu’il codirige, avait édité un affiche de promotion de la soirée qui stipulait que celle-ci était organisée « en hommage aux héros de la résistance », à savoir le général iranien Qassem Soleimani, ex-commandant en chef de la force al Qods, l’unité d’élite en charge des opérations extérieures du Corps des gardiens de la Révolution islamique, tué lors d’une frappe américaine en Irak en 2020, et Abou Mehdi al-Mouhandis, son bras droit en Irak, placé par Washington sur la liste des individus visés par des sanctions pour terrorisme. Ce dernier est soupçonné – entre autres – d’avoir été partie prenante dans les attentats contre les ambassades de France et des États-Unis au Koweït, en décembre 1983.

La force al Qods, quant à elle, est impliquée, aux côtés du Hezbollah, dans le trafic de drogue (cocaïne, captagon), le trafic d’armes, et le blanchiment d’argent. Spécialiste de la guerre asymétrique, de la cyber-guerre, des opérations d’infiltration et d’influence, elle a coordonné depuis 30 ans, avec la milice chiite libanaise – créée en 1982 par le Corps des Gardiens de la Révolution islamique – la plupart de ses attaques contre Israël, et de nombreux attentats. Elle fournit des armes aux groupes jihadistes soutenus par la République islamique d’Iran comme le Hamas ou le Jihad islamique, et les forme militairement. En Syrie, ses troupes ont apporté une assistance essentielle à Bachar al Assad.

En 2017, le département du Trésor des États-Unis a désigné le Corps des Gardiens de la Révolution Islamique (IRGC) comme groupe terroriste en vertu du décret exécutif 13224, « pour ses activités de soutien à l’IRGC-QF » ( acronyme anglais pour Islamic Revolutionary Guard Corps-Qods Force, ndlr). Le 15 avril 2019, le Département d’État américain a enfin désigné le Corps des Gardiens de la Révolution Islamique, avec sa force al Qods, comme Organisation Terroriste Étrangère.
Plus près de nous, le vendredi 8 novembre 2024, un compte twitter se revendiquant de la ligne de la force al Qods, indiquait, au lendemain du pogrom d’Amsterdam : « Jusqu’à présent, 10 Israéliens ont été blessés … et certains rapports indiquent que 7 sionistes sont portés disparus. Aucun endroit au monde ne devrait être sûr pour les sionistes ». Des mots terrifiants.

Dès lors, qu’est ce qui pouvait motiver un honorable chercheur français à intervenir dans une conférence pour le moins complaisante à l’égard de deux personnalités iraniennes liées au terrorisme islamiste international ? Pourquoi, en sa qualité de vice-président d’une des deux associations invitantes, a-t-il accepté qu’une telle réunion se tienne ?

Nous avons visionné une vidéo de la conférence, mise en ligne. On y voit un reportage précédant l’intervention d’Elyamine Settoul, qui met en scène Abou Mehdi al-Mouhandis peu avant sa mort, citant en persan l’ayatollah Khomeini comparant les États-Unis « au diable », et se lançant dans un récit quasi mystique de sa relation avec le chef de la force al Qods, Qassem Soleimani.

Le « professeur » Settoul prend ensuite la parole en direct simultané via visioconférence – sans parler des attentats perpétrés par Abou Mehdi al-Mouhandis et al Qods -, au côté d’un invité de son association, bien connu lui aussi des services antiterroristes occidentaux : le cheikh Ali Sbeiti, imam chiite lié au Hezbollah libanais, officiant notamment au Canada et qui, selon l’un de nos contacts au sein du régime iranien, « dépend du Guide suprême de la Révolution islamique », Ali Khamenei.

Ali Sbeiti, nous avons pu le vérifier, a suivi une formation au sein de l’université religieuse de Qom, laquelle est aux mains des religieux iraniens et de la force al Qods, qui forme les agents d’influence de la République islamique d’Iran. Tout « étudiant » étranger admis à y suivre des cours doit prêter serment d’allégeance au guide suprême iranien Ali Khamenei…

En février 2015, les autorités fédérales canadiennes ont confisqué son passeport à Sbeiti, à la suite d’une enquête criminelle conduite par la sécurité nationale, avant qu’il lui soit restitué et que l’on apprenne qu’il était sous surveillance des services canadiens, et qu’il organisait des célébrations en hommage à l’ayatollah Khomeini, fondateur de la République islamique d’Iran.

On pourra évidemment rétorquer qu’Elyamine Settoul ne connaissait pas les accointances d’Ali Sbeiti avec la sphère islamiste iranienne et le Hezbollah. Elles ont pourtant fait l’objet de plusieurs articles en source ouverte, que tout chercheur avisé peut trouver sur Internet….
On peut aussi se demander s’il avait entendu parler de Qassem Soleimani et d’Abou Mehdi al-Mouhandis, dont les portraits figuraient sur l’affiche de la conférence. Mais encore une fois, compte tenu de son niveau d’expertise et de la rigueur que celle-ci implique, il ne pouvait méconnaitre de qui il s’agissait.
Et c’est d’autant plus ennuyeux que ladite affiche rend « hommage » à deux membres d’une organisation connue par les experts pour être impliquée dans des dizaines d’attentats et d’opérations terroristes depuis plus de 30 ans. Là encore, cela n’a pas semblé embarrasser Elyamine Settoul, qui n’a jamais évoqué le parcours des deux hommes, ni même questionné Ali Sbeiti sur son lien avec le Hezbollah.

« Un exemple de la stratégie iranienne en Europe et aux États-Unis »

L’anthropologue Florence Bergeaud-Blackler, auteur du livre « Le Frérisme et ses réseaux » (Odile Jacob), qui a documenté de nombreux cas d’entrisme islamiste au sein des universités françaises, a visionné la vidéo de ladite conférence, et l’a l’analysée (voir son interview).
Pointant le relativisme de Settoul, sa conclusion est sans appel : « soit il savait à qui il avait affaire, et c’est grave. Soit-il ne le savait pas, et ça en fait un élément manipulable ».

Un autre spécialiste s’est intéressé à l’intervention de Settoul : Matthieu Ghadiri, ancien agent du contre-espionnage français qui a infiltré le corps des Gardiens de la révolution, et qui est un expert des techniques d’influence de la République islamique d’Iran. Voici ce qu’il dit : « cette réunion entre un Imam chiite libanais du Hezbollah, et des intellectuels proches des idées des Frères musulmans pour rendre hommage à Qassem Soleimani, qui a été tué le 3 janvier 2020 en Irak, est un exemple de la stratégie iranienne en Europe et aux États-Unis (…). La République Islamique, pour qu’elle puisse infiltrer les universités européennes et américaines en général, et en particulier les universités françaises, a un peu copié sur la politique d’infiltration des Frères musulmans. Les Iraniens ont compris qu’ils avaient intérêt à se rapprocher des Frères musulmans sunnites, afin de diffuser leurs idées dans les pays non musulmans. Mais la tâche étant très difficile du fait de leurs différences, c’est là que l’idée de la création d’une « Internationale islamique » a germé dans la tête des théoriciens de la République islamique. Cela consiste, pour les mollahs Iraniens, à aider et soutenir les groupes et les organisations sunnites au Proche-Orient, et en échange, à profiter des réseaux actifs des Frères musulmans en Europe et aux Etats-Unis. »

Mohamed Louizi, ingénieur et essayiste (il fut frère musulman jusqu’en 2006, ndlr), qui est l’auteur du livre « Pourquoi j’ai quitté les Frères musulmans » (Michalon, 2016), est considéré comme l’une des personnalités les mieux informées sur les mécanismes d’infiltration et d’ingérence des Frères musulmans. Il témoigne : « quand j’enquêtais sur la présence des relais des Frères musulmans dans les aumôneries des Armées, je suis tombé sur le cas Settoul. J’ai vu que sa thèse était financée, pour partie, par le ministère de la Défense. Cela m’a étonné (…). Pour moi, Settoul coche des cases qui sont celles des acteurs, des influenceurs, qui gravitent autour de la mouvance frériste. Si tel n’était pas le cas, il ne serait pas dans ce genre de conférence. Ceux qui arrivent à séduire des mouvances en recherche de dédiabolisation comme c’est le cas pour lui, ne sont pas n’importe qui. Se retrouver sur une affiche comme celle-ci n’est pas anodin. Il sert de manière certainement consciente une cause, qui rend le régime des mollahs fréquentable, et montre qu’on peut discuter avec lui (…). Il fait partie de ces gens qui nagent dans des eaux troubles, qu’on peut trouver parfois dans l’entourage des Armées françaises (…). »

Elyamine Settoul a fait, récemment, une demande d’intégration au sein de la réserve opérationnelle. L’État-Major des armées nous a fait savoir qu’elle n’avait pas été acceptée.

Settoul ne répond pas à nos questions, et invoque son groupe de travail à l’école militaire

Nous avons pris attache avec Elyamine Settoul, et lui avons demandé, via l’application WhatsApp, pourquoi il avait « donné une conférence dont l’affiche de présentation faisait l’apologie de Qassem Soleimani » et pour quelle raison il n’avait pas invalidé la venue d’Ali Sbeiti, lié au Hezbollah.
Il nous a répondu, via mail, en utilisant de façon surprenante le tutoiement, que « ladite association « soi-disant spécialisée » sur la « radicalisation juvénile » l’avait inscrit « dans son board et a utilisé mon nom de chercheur à mon insu ». Qu’il avait demandé le retrait de son nom de son site internet « quand j’ai constaté la teneur des discours tenus en ligne par certains intervenants (…) ». Qu’il avait réitéré sa demande « de retrait auprès de cette association sous peine de poursuites judiciaires », et qu’il avait également saisi la protection fonctionnelle du ministère de l’Enseignement de la Recherche et fait un signalement auprès de la direction de l’ IRSEM (…) ».

Il a également argué du fait que « compte tenu de cette situation juridique », il ne pouvait répondre à ces questions, et n’a pas davantage répliqué à celles qui suivaient, sur le Hamas et Israël, ni même justifié le fait que malgré ses dénégations, il était bien présent à cette conférence.

Il nous a enfin écrit qu’il serait disposé à faire une interview sur la situation à Gaza, « dans le prolongement du groupe de travail mis sur pied par O. (…) » à l’école militaire, le 17 octobre, son mail étant curieusement adressé en copie à l’officier en question, comme s’il voulait se retrancher derrière une institution dont il ne fait pourtant pas partie, selon ce que nous a confirmé une deuxième fois l’État-Major. Étonnant. Dans les faits, la vidéo de la soirée montre que ce soir-là, Settoul s’est dit « très heureux d’être là pour discuter avec les membres et sympathisants » des deux associations invitantes, alors même que le reportage apologétique des deux cadres de la force al Qods avait été diffusé, et que l’animateur de la conférence s’était montré dithyrambique à leur sujet, les qualifiant de « martyrs qui ont marqué l’histoire et la vie de millions de gens », sans même un mot pour leurs nombreuses victimes.

Pour rappel, à aucun moment durant la conférence, le chercheur n’a fait part d’un quelconque malaise, ou d’une quelconque critique. Dès lors, on s’interroge, forcément, sur ses liens avec des gens qui font la promotion de hautes personnalités du régime des mollahs, surtout quand on sait que le ministère des Affaires étrangères iranien, les services de renseignement de la République islamique d’Iran et la force al Qods, tentent régulièrement de s’attirer les bonnes grâces de chercheurs occidentaux, dont les idées sont compatibles avec les leurs.

Le ministère des affaires étrangères iranien tente de retourner des chercheurs occidentaux

En 2014, des hauts fonctionnaires du ministère iranien des Affaires étrangères, aidés par les services de renseignement de la République islamique d’Iran, auraient monté une opération d’influence en occident, dont le nom de code était « Initiative des experts iraniens ». C’est ce que raconte le grand journaliste américian Jay Salomon, ex chef du service des affaires étrangères du Wall Street Journal et auteur de The Iran Wars (Random House, 2016), qui a consacré une enquête très détaillée sur le sujet pour le site d’informations Semafor , intitulée « Inside Iran’s influence operation » (Au coeur de l’opération d’influence de l’Iran, ndlr).
Selon notre confrère, l’opération en question avait pour objectif d’approcher des diplomates, des cercles d’influence politiques et des thinktanks aux États-Unis et en Europe, ainsi que des chercheurs et des experts universitaires en vue de leur fournir des éléments de langage favorables à la République islamique d’Iran, qu’ils pourraient à leur tour diffuser lors de conférences ou de passages dans les médias. L’un de ses axes consistait à faire passer l’idée que le programme nucléaire iranien ne représentait aucun danger, et qu’il était de l’intérêt des occidentaux de trouver un compromis avec Téhéran.

Aux États-Unis, l’« Initiative des experts iraniens » prit cependant une ampleur inattendue, admettant en cause une haute fonctionnaire du Pentagone et des universitaires irano-américains, dont certains sont aujourd’hui suspectés d’avoir servi les intérêts de Téhéran.

L’Europe, à commencer par la France, a également été une cible de choix pour les services secrets iraniens. Pour s’en convaincre, il suffit de lire l’interview que nous avons réalisée de Matthieu Ghadiri, qui est également l’auteur du livre « Notre agent iranien » (éditions Nouveau Monde) dans lequel il raconte comment les services secrets de la République islamique d’Iran font de l’entrisme et de l’espionnage en France, notamment dans les milieux politiques et universitaires, en utilisant le groupe des « réformateurs iraniens ». Parlant de son expérience de ces derniers, il assure : « ils approchaient les partis politiques pour faire passer leurs idées. Ils faisaient aussi de l’influence en leur disant par exemple que si la République islamique devait s’écrouler, alors l’Iran deviendrait l’Irak ou la Syrie. Plein de gens, qui voulaient tisser des relations durables avec eux, sont tombés dans leurs filets. »

Matthieu Ghadiri ajoute qu’en France, les profils convoités par les services secrets iraniens pour faire de l’influence, sont multiples : « leurs cibles, c’étaient des médecins, des avocats ou des pharmaciens iraniens résidant en France. Durant la période où j’étais en activité, il y en a eu plusieurs identifiés en France et en Europe. Une fois recrutés, ils avaient pour mission de prendre contact avec des personnalités de gauche, d’assister à des réunions (…). Les services Iraniens pouvaient également recruter des étudiants qui se trouvaient en situation précaire. Il leur était aussi demandé de prendre attache avec des associations, puis avec des politiques. »
L’ex espion le dit sans ambages : ces opérations de recrutement et d’influence « se poursuivent encore aujourd’hui. »

La République islamique d’Iran mène une guerre d’influence sur le sol français

Le 26 novembre 2022, le général Hossein Salami, commandant en chef du Corps des Gardiens de la Révolution Islamique, expliquait dans un discours prononcé à Zāāhedāān, la capitale du Sistan Balouchistan : « Notre pays est en guerre mondiale (…) Nos ennemis sur la scène internationale sont les États-Unis, Israël, le Royaume-Uni, la France, l’Allemagne, la famille Al Seoud ». On ne saurait être plus clair. Il revenait aux fondamentaux du régime iranien tels que pensés par l’Ayatollah Khomeini en 1979, à savoir « la guerre contre les pays non-musulmans. »

Par cette formule, « on doit comprendre que pour la République islamique d’Iran, la guerre n’est pas militaire. C’est une guerre d’influence », raconte Matthieu Ghadiri. Il ne faut pas penser, cependant, que les services de renseignement iraniens, hyperactifs, se contentent d’essayer de manipuler des intellectuels pour mener à bien leur combat.

En France, Téhéran jouit tout particulièrement du soutien d’un jeune influenceur, Shahin Hazamy, né d’une mère algérienne et d’un père iranien. Brillant et hyper actif, celui qui est présenté par ses supporters comme un journaliste citoyen, voire un « ghetto reporter », ne ménage pas sa peine pour donner une image complaisante du régime des mollahs.

Il s’est ainsi rendu en Iran, prétendant notamment, dans un clip vidéo, qu’en République islamique « on est très loin des clichés véhiculés par les médias occidentaux ». D’après l’une de nos sources iraniennes à l’intérieur du pays, Hazamy aurait visité la ville religieuse de Qom ( Une vidéo, que nous avons consultée sur son compte Instagram, intitulée road trip en République islamique le confirme), ce qui interroge, quand on sait – comme nous l’avons expliqué précédemment – que des agents d’influence étrangers y sont formés. On le voit d’ailleurs poser, sur une photographie publiée sur l’un de ses comptes , sur les marches du ministère des Affaires Étrangères iranien à Téhéran, aux côtés de hauts responsables, et de Kemi Seba, un militant suprémaciste béninois pro-iranien ayant lui-même reconnu avoir reçu de l’argent iranien , et qui a été déchu de sa nationalité française.
Shain Azamy en photo à Téhéran, aux côté du militant suprémaciste Kemi Seba sur les marches du Ministère des Affaires Étrangères de la République islamique d’Iran.

Récemment, Hazamy, qui s’est aussi fendu d’un voyage au Liban, se réjouissait sur Instagram de « l ‘attaque de l’entité dévastatrice de l’Iran contre l’entité occupante ! », à savoir Israël…

Bien qu’en France, la provocation et l’apologie du terrorisme soient passibles de poursuites pénales, Hazamy se targuait encore, sur ses réseaux sociaux, de « soutien à l’axe de la résistance », lequel désigne l’alliance entre la République islamique d’Iran, la Syrie, les Houthis et des groupes terroristes tels le Hezbollah,… le Hamas et le Jihad islamique, ou encore les milices Hachd al-Chaabi en Irak.
Dans la même veine, il déplorait au printemps dernier « que Bashir Biazar , « un jeune ressortissant iranien, a été interpellé par la police française près de Metz. » Son tort, selon l’influenceur issu des quartiers : « avoir diffusé sur ses réseaux sociaux des stories et des publications propalestiniennes. » Problème : Shahin Hazamy omettait de préciser que Bashir Biazar, qui résidait à Dijon, était suivi par le contre-espionnage français, car soupçonné d’appartenir à la force al Qods du Corps des gardiens de la révolution, information largement publiée dans la presse française et reprise sur Internet.
Biazar, « agent de haut niveau », aurait été envoyé en mission en France par Téhéran, pour surveiller des opposants iraniens, et faire de l’influence en milieu universitaire.

Biazar et Hazamy communiquaient-ils via leurs réseaux respectifs ? L’une de nos sources proches de l’enquête explique que « d’une manière ou d’une autre, on peut le supposer, tant Hazamy semble avoir mal vécu l’expulsion de l’espion iranien. » Sans parler de sa fascination pour les proxys terroristes de « l’axe de la résistance », tous en lien direct avec la force Al Qods…

Bref, des partis pris qui font que l’on s’étonne que Hazamy n’ait pas été entendu par la police française. D’autant qu’il donne des conférences publiques, y compris en milieu scolaire, alors qu’il fait l’objet de quatre plaintes déposées contre lui (nous avons pu consulter ces plaintes, ndlr). Il aurait agressé, le 5 juillet 2024, devant l’ambassade de la République islamique d’Iran à Paris, des opposants laïcs iraniens, dont certains affirment qu’il était accompagné de « gros bras » travaillant pour le régime des mollahs.

Nous avons adressé un message à Shahin Hazamy, pour l’informer que nous préparions une enquête sur la stratégie d’influence de la République islamique d’Iran, et lui proposer de répondre à nos questions. Il n’a pas donné suite.

Complices ou naïfs, Settoul et Hazamy soutiennent l’insoutenable.
Les parcours respectifs d’Elyamine Settoul et de Shahin Hazamy, – l’intellectuel et le Bad boy, influenceur des quartiers – laissent penser que les opérations d’influence de la République islamique d’Iran en France peuvent revêtir des visages aussi différents qu’inattendus. Et quel que soit le degré de naïveté dont pourraient faire part les deux hommes – on peut toujours imaginer qu’ils sont manipulés – il demeure étonnant qu’ils participent, chacun à sa manière, à des récits victimaires ou quasi hagiographiques de membres éminents de la force al Qods, qu’il s’agisse de Soleimani ou de Bashir Biazar.
Rappelons, à toutes fins utiles, que selon un rapport d’Amnesty international, la République islamique d’Iran a procédé à 853 exécutions en 2023, et que pour le seul mois d’octobre 2024, un Iranien a été pendu toutes les 4 heures.

Bref. Si l’on ajoute à la complaisance des deux hommes envers des sicaires à la solde des mollahs iraniens, leur relativisme bienveillant à l’égard du Hamas pour le premier, et de « l’axe de la résistance » pour le second, deux questions viennent à l’esprit : quel est leur intérêt à se positionner ainsi ? Peut-on désormais se montrer accommodant avec une organisation terroriste, ou faire l’apologie d’un régime islamiste totalitaire qui détient des otages français et menace la stabilité du monde, sans avoir à rendre des comptes à l’autorité judiciaire ?

À toutes ces interrogations, un éminent spécialiste du renseignement nous a donné un début de réponse : « les services en savent plus que vous, ne soyez pas naïf. Tous ces cas sont à priori connus. Mais ce n’est pas à eux de donner l’impulsion. À un moment, il faut qu’il y ait un magistrat qui intervienne. Où qu’il y ait une volonté politique d’agir. Ça viendra, forcément. »

Cette enquête a été réalisée en partenariat avec le Sept.info.
Cette association a invité, il y a quelques années, plusieurs journalistes et chercheurs français spécialistes du Moyen-Orient – parmi lesquels notre journaliste – qui alertaient sur la menace frériste, pour qu’ils interviennent bénévolement sur la question de la menace terroriste islamiste. Il a été supposé qu’il s’agissait d’une « opération séduction ».
Nous avons choisi de ne pas divulguer le nom de l’officier, considérant qu’il n’était en rien responsable des prises de positions d’Elyamine Settoul.