TRIBUNE – Reconnaître un État sous l’égide de l’Autorité palestinienne, avec une direction corrompue et discréditée, n’améliorera en rien la vie des Gazaouis, estiment l’ancien secrétaire d’État américain Mike Pompeo et l’entrepreneur Sander Gerber.
Par Mike Pompeo et Sander Gerber
L’Europe a contribué à rédiger les conventions de Genève et le statut de Rome. Pourtant, certains gouvernements envisagent aujourd’hui de reconnaître un État palestinien dirigé par des autorités qui violent ouvertement ces textes. Le prix de la naïveté à l’égard de l’Autorité palestinienne est trop élevé – et il se paie dans le sang.
Lors d’un récent échange avec le ministre israélien des Affaires étrangères, Gideon Sa’ar, le ministre français Jean-Noël Barrot a affirmé, pour justifier le projet de reconnaissance, que l’Autorité palestinienne (AP) avait mis fin à son programme dit pay for slay.
C’est faux. Ce programme, inscrit dans la loi, verse de généreux salaires mensuels à plus de 40.000 terroristes emprisonnés, anciens détenus et familles de «martyrs». Des versements réguliers ont encore eu lieu le 3 septembre. Croire que le loup de l’AP s’est transformé en agneau relève du fantasme.
L’exemple du système «pay for slay»
Les promesses de reconnaissance d’un État traduisent l’exaspération devant le conflit persistant à Gaza. Mais une reconnaissance sous l’égide de l’AP n’apporterait ni paix ni prospérité; elle enracinerait les Palestiniens – et l’Europe elle-même – dans des cycles plus profonds de terrorisme et d’instabilité.
Le problème n’est pas l’État palestinien en principe, mais la nature de ceux qui sont actuellement en position de le gouverner. Reconnaître un État sous l’actuelle AP reviendrait à renforcer une architecture sociétale de violence aux lourdes implications pour l’Europe.
Les projets actuels consistent à accorder à l’AP davantage de pouvoir pour distribuer l’aide et diriger la reconstruction de Gaza, sans proposer de réformes. Ces démarches rappellent les accords d’Oslo, qui ont échoué à instaurer une gouvernance responsable et une société civile solide.
Le système pay for slay illustre ce problème. Son budget dépasse de loin les dépenses sociales, gaspillant les ressources et privilégiant le terrorisme aux besoins économiques réels. Combinée à la glorification des terroristes dans les écoles et les médias, cette politique enferme la jeunesse palestinienne dans l’hostilité envers Israël plutôt que de lui offrir un avenir.
Une radicalisation incompatible avec les normes occidentales
La radicalisation à Gaza et en Cisjordanie présente des dangers bien au-delà du Moyen-Orient. Accorder une légitimité aux dirigeants qui entretiennent cette idéologie permet sa diffusion au-delà de la région.
Plus préoccupant encore, nombre de responsables de l’AP sont de véritables terroristes qui bénéficieraient d’un statut diplomatique et d’une mobilité internationale. Une reconnaissance dans ces conditions trahirait les valeurs que l’Europe revendique et cautionnerait la militarisation de la société civile.
Les atrocités du 7 octobre, et la désignation par l’AP des assaillants capturés ou tués comme prisonniers de guerre et martyrs devant être rémunérés, ont révélé une radicalisation incompatible avec les normes occidentales. Cet endoctrinement viole le droit international.
L’AP et le Hamas contreviennent à la quatrième convention de Genève (articles 4 et 13) et au statut de Rome (articles 7, 8 et 25) – qui prohibent, en tant que «crimes contre l’humanité», l’incitation organisée à la violence illégale. Reconnaître un État palestinien reviendrait à faire violer à l’Europe l’ordre juridique qu’elle a contribué à bâtir après 1945.
«Le peuple palestinien lui-même partage ce constat»
Le programme pay for slay constitue une violation directe de ces normes. De plus, la résolution 1373 du Conseil de sécurité de l’ONU interdit tout soutien financier à des entités qui sponsorisent ou facilitent le terrorisme – ce qui vise aussi l’AP.
Cela ne signifie pas abandonner les Palestiniens. Au contraire, c’est prendre leur bien-être au sérieux. Imposer la création d’un État sous une direction corrompue et discréditée n’améliorera pas la vie quotidienne à Gaza ou en Cisjordanie. Le véritable progrès exige des réformes fondamentales – dans l’éducation, le système social et la gouvernance.
De récents sondages indiquent qu’une majorité de Palestiniens s’abstiendrait lors de prochaines élections ou refuserait de soutenir les partis actuels. Le groupe suivant en importance continue de soutenir le Hamas – organisation terroriste désignée par l’UE. Une majorité significative de Palestiniens a approuvé les attaques du 7 octobre.
La solution ne peut consister à imposer aux Palestiniens une direction qu’ils rejettent, ni à la remplacer par une autorité imposée par l’Occident.
Un avenir possible
Nous devons croire au peuple palestinien pour lui assurer un avenir de prospérité. Cela ne peut se faire en renforçant ni le Hamas ni l’AP, qui ont trahi à maintes reprises leurs propres populations.
La solution doit venir de la communauté internationale – menée par les nations arabes – résolue à mettre en œuvre des réformes de fond. La bonne nouvelle est que le Golfe arabe offre plusieurs exemples de sociétés modérées et multiconfessionnelles. Les États de la région doivent être impliqués afin de favoriser l’émergence d’une nouvelle entité palestinienne, affranchie de toute ambition militante.
Ce n’est qu’alors que la communauté internationale pourra juger si les Palestiniens disposent d’un système de gouvernance capable de rejoindre la communauté des nations.