« Si la Force intérimaire des Nations unies, qui a un rôle essentiel, avait fait son travail, nous ne serions pas contraints d’utiliser la force dans le Sud Liban »
L’Opinion – S.E. Joshua Zarka, Ambassadeur d’Israël en France
Les faits –
Joshua Zarka a pris ses fonctions d’ambassadeur d’Israël en France en mai 2024. Il était précédemment directeur général adjoint pour les affaires stratégiques au sein du ministère des Affaires étrangères de l’Etat hébreu. Connu pour être un expert de l’Iran, il a également été en poste au Canada, en Côte d’Ivoire, en Suisse et aux Etats-Unis.
Depuis le 7 octobre 2023, Israël est en guerre sur sept fronts.
Tous, lui ont été imposés. Tous, sont pilotés par le régime des Mollahs, obsédé par la destruction d’Israël et le développement de son programme nucléaire, mais qui peine à cacher, malgré ses tentatives de lisser son image par un nouveau Président prétendument progressiste, sa haine contre l’Occident et son souhait de faire régner l’obscurantisme sur le monde libre.
Pour deux de ces fronts, les ennemis de la seule démocratie du Moyen-Orient ont cru venu le temps de la disparition de l’Etat d’Israël. Le Hamas et le Hezbollah ont plongé la région, assombrie par de nombreuses années sous le joug islamiste, dans la torpeur en forçant Israël à se défendre.
Si le front sud semble progressivement se fermer après plus d’un an de guerre contre les terroristes du Hamas dont les capacités militaires sont à présent anéanties, à la frontière israélo-libanaise, les onze mois d’efforts diplomatiques entrepris par la France, les Etats-Unis et Israël pour contraindre le Hezbollah au respect de la résolution 1701 du Conseil de sécurité de l’ONU ont échoué, ne laissant comme possibilité que le recours à la force.
Car depuis le 8 octobre précisément, ce sont 13 000 projectiles, plus de 9 000 missiles balistiques, 1 500 missiles antichars et des centaines de drones qui ont ciblé les Israéliens au nord du pays. A ce jour, 70 000 Israéliens sont encore déplacés et n’ont pu rentrer chez eux depuis plus d’un an.
Mais sur ce front, une particularité : l’ONU, garante depuis 2006 de la zone sud du Liban avait la responsabilité du respect de la résolution 1701 prévoyant le désarmement du Hezbollah et l’absence de toutes milices paramilitaires au sud du Litani pour assurer la paix après 2006. Jusqu’à aujourd’hui encore, la Finul n’a rien fait. Pire, elle a laissé grandir une menace existentielle pour l’Etat d’Israël et pour les Libanais et fatale pour la stabilité de la région.
Pourtant, la mission des soldats de la paix ne manquait pas d’intérêt dans une région où les peuples la désirent plus que dans n’importe quel autre ailleurs, et où le terrorisme islamiste gangrène un pays et lui confisque tout espoir d’amélioration.
C’est donc après 18 ans de mandat onusien et un an de tirs incessants qu’Israël a décidé d’intervenir pour mettre fin aux multiples violations du droit international de la milice terroriste du Hezbollah. L’objectif est clair : permettre à la population israélienne de rentrer chez elle à la frontière israélo-libanaise, sans que ses habitants ne craignent pour leur vie. Un « calme relatif » apprécié dans le dernier rapport précédant le 7 octobre publié par le Secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, pour décrire une situation qui dépassait de loin ce que l’on pouvait imaginer.
Depuis le 1er octobre et le début de l’opération israélienne contre les activités du Hezbollah, les forces israéliennes ont frappé plusieurs itinéraires de contrebande d’armes en provenance de l’Iran via la Syrie et l’Irak et mené des frappes ciblées sur différents postes stratégiques du groupe terroriste, détruisant près de 80 % de leurs capacités militaires et supprimant des centaines de terroristes en l’espace de quelques semaines. Des violations évidentes de la résolution 1701 et un calme plus que relatif, donc, que les rapports de la Finul n’ont jamais évoqués jusqu’à présent, allant jusqu’à taire la présence du Hezbollah au sud du Litani.
Tunnels. Pourtant, c’est bien sous les yeux et à la vue de l’ONU que le Hezbollah s’est implanté progressivement au Sud Liban et s’est renforcé pour devenir un acteur majeur de la déstabilisation de la région et une menace pour la sécurité d’Israël. En témoigne le plan découvert au début de l’opération au Sud Liban visant à attaquer Israël depuis des positions se trouvant sur la frontière. La découverte des tunnels en 2018 avait alerté Israël d’un danger imminent au nord, finalement devancé par le Hamas au sud d’Israël qui reproduira le plan initié par le Hezbollah le 7 octobre dernier.
« Conquer the Galilee » est le nom du plan établi par le Hezbollah pour mener une attaque similaire aux massacres du 7 octobre, à plus grande échelle, détaillant avec précision les communautés israéliennes vivant proche de la frontière, les positions des forces militaires, les axes routiers et les cibles identifiées.
C’est à cette fin que le Hezbollah avait érigé plus de trente avant-postes militaires le long de la Blue Line agissant sous la couverture de l’ONG « Green without borders », censée agir pour la protection des espaces verts libanais et déclarée organisation terroriste par les Etats-Unis en 2023. Les vaines tentatives d’alertes israéliennes n’auront rien donné, et n’auront pas été actées dans les rapports de la Finul. Les avant-postes ont fini par être démantelés par les forces israéliennes.
Un réseau souterrain devant permettre l’organisation de ce plan macabre a été retrouvé, contenant, entre autres, de l’armement de pointe et des centres de commandement. En plus des six tunnels découverts entre 2018 et 2019, de nouveaux ont été identifiés et démantelés. L’un d’entre eux traversait de plusieurs mètres la frontière israélienne. Rien n’a été inscrit à ce propos dans les rapports de la Finul.
Omerta. L’une des dernières cartes utilisées par le Hezbollah est la stratégie d’implantation des sites terroristes de haute importance à proximité de lieux considérés comme sensibles. Cette stratégie, largement utilisée à Gaza par le Hamas, se servant d’écoles, de locaux de l’UNRWA, d’hôpitaux ou de centres de réfugiés pour cacher de l’armement ou ses centres de commandement, est utilisée par le Hezbollah au nord, à proximité des positions de la Finul. C’est ainsi que les forces de défense israéliennes ont découvert un tunnel à quelque 150 mètres d’un poste de l’organisation des soldats de la paix. Ces derniers mois, plusieurs roquettes et missiles ont été lancés proche des positions de la Finul. Les exemples sont légion, sans qu’ils apparaissent dans les rapports de la Finul.
Comment comprendre l’omerta sur les activités du Hezbollah dans les rapports de la Finul ? Est-ce le résultat des multiples tentatives d’intimidation que le Hezbollah porte, entre autres, contre les soldats de la paix et les médias occidentaux, qui ne peuvent faire état des réalités du terrain sans craindre de graves représailles ?
Comment justifier la position du Secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, face à son refus de retirer temporairement les forces de paix de la Finul pour permettre à Israël d’anéantir les forces du Hezbollah au Sud Liban et de créer, enfin, les conditions du respect de la Résolution 1701 ?
Si la Finul, qui a un rôle essentiel, avait fait son travail, nous ne serions pas contraints d’utiliser la force dans le Sud Liban.
La Finul a failli, mais la paix ne peut plus attendre.
Obscurantisme. L’avenir de la région se joue aujourd’hui dans un Moyen-Orient qui cristallise les tensions entre le monde occidental et ses valeurs démocratiques et celui qui se pose en résistant, opprimé des libertés, un monde obscurantiste orchestré par la République Islamique iranienne et ses proxys.
L’Etat d’Israël se défend pour protéger sa souveraineté et garantir la sécurité de son peuple face aux multiples menaces terroristes orchestrées par l’Iran. Nous poursuivrons nos efforts jusqu’à ce que nos citoyens puissent revenir chez eux sans craindre pour leur vie.
C’est pourquoi nous demandons, face aux prises d’otages systématiques des positions des soldats de la paix et face aux compromissions de la Finul, que les pays contributeurs appuient notre demande de retrait temporaire des forces de la Finul au-delà de 5 km de la frontière.
L’anéantissement des capacités militaires du Hezbollah est une première étape dans le long processus de changement qui attend la région libérée du joug islamiste et iranien. Une réforme de la Finul est inévitable pour permettre le plein respect de la résolution 1701 et adopter une nouvelle approche pour le futur de la région.
Nous, Israéliens, pensons que la France a un rôle essentiel à jouer pour reconstruire les bases d’une paix solide et créer les conditions d’une stabilité durable au Moyen-Orient.
Joshua Zarka est ambassadeur d’Israël en France