En pleine fuite en avant, les Houthistes yéménites intensifient leurs attaques contre Israël

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Privé du Hezbollah libanais et de son allié Bachar Al Assad en Syrie, l’Iran mobilise un autre pion de son « axe de la résistance » pour nuire à son ennemi juré, Israël.

Vinciane Joly, La Croix


Les sirènes d’alerte ne cessent de résonner dans le ciel de Tel- Aviv et dans le centre du pays, poussant les Israéliens à courir dans la panique vers leurs abris, jusqu’à ce que l’explosion retentisse. Depuis la mi-décembre, les rebelles houthistes yéménites ont intensifié leurs attaques contre Israël. Mardi 31 décembre, ils ont lancé deux missiles, le premier visant l’aéroport Ben Gourion près de Tel-Aviv et le deuxième sur une centrale électrique au sud de Jérusalem, a déclaré leur porte-parole militaire, Yahya Saree. Dix jours plus tôt, des débris de missile faisaient plusieurs blessés à Jaffa.

Israël a riposté à plusieurs reprises, en visant notamment l’aéroport de Sanaa, la capitale du Yémen, tenue par les Houthistes, ainsi que des infrastructures énergétiques. Les États-Unis et le Royaume-Uni ont eux frappé le port de Hodeïda, base à partir de laquelle les rebelles (qui contrôlent de facto le détroit de Bab el Mandeb) torpillent les bateaux en mer Rouge, depuis le début de la guerre à Gaza.

Les Houthistes, des chiites zaïdites qui administrent un tiers du territoire yéménite (et 60 % de la population), ont, à la suite du 7 octobre, lancé des roquettes sur le territoire israélien, en « solidarité avec le peuple palestinien », affirment-ils. Au cours des douze derniers mois, ils ont ainsi expédié plus de 200 missiles et 170 drones en direction de l’État hébreu, selon l’armée israélienne. Toutefois la grande majorité de ces projectiles n’a pas atteint le territoire visé ou a été interceptée.

Les Houthistes ont également attaqué des navires de l’État hébreu ou de ses « alliés » en mer Rouge, l’une des voies commerciales les plus empruntées au monde. De nombreux bâtiments ont renoncé à s’engager dans cette voie d’eau, préférant faire le tour par le cap de Bonne espérance. Ce qui a provoqué une chute annuelle de 2 milliards de dollars des revenus tirés par l’Égypte de l’exploitation du canal de Suez.

  • Pourquoi intensifient-ils leurs attaques maintenant ?

L’intensification des attaques des Houthistes intervient au moment où Israël a lancé une offensive pour mettre hors-service le dernier hôpital du nord de l’enclave. « Tant que des enfants de Gaza seront tués chaque jour, les sionistes ne pourront pas dormir », a ainsi écrit en hébreu sur X Hezam al-Asad, un responsable houthiste.

Mais au-delà de la rhétorique virulente des rebelles yéménites, le regain des tensions intervient dans un contexte d’affaiblissement de « l’axe de la résistance », le chapelet de milices arabes utilisées par la République islamique d’Iran dans sa lutte contre Israël. En l’espace de quelques semaines, le leadership du Hezbollah libanais a été décimé par Israël et ses capacités fortement diminuées au terme d’une campagne de bombardements massifs de deux mois, mise en pause par un cessez-le-feu le 27 novembre. Puis le régime de Bachar Al Assad, allié de Téhéran, est tombé le 8 décembre.

L’Iran, privé de deux de ses proxies, peut encore compter sur les Houthistes. Par leur participation au « front de soutien » à Gaza et leur capacité de nuisance en mer Rouge, les Houthistes sont passés du statut d’acteurs locaux à celui de pions régionaux de l’axe pro-iranien. « Téhéran essaie de réagir avec l’une des dernières cartes dont il dispose encore, analyse Marc Lavergne, directeur de recherche émérite au CNRS. L’Iran veut montrer qu’il est toujours là, qu’Israël et les Occidentaux n’ont pas encore remporté la bataille. C’est assez symbolique. »

  • Comment réagit Israël ?

Sans parvenir forcément à toucher le territoire israélien, les Houthistes représentent une menace psychologique et économique importante pour Tel-Aviv. Les Israéliens sont soumis aux sirènes d’alarme une nuit sur deux ; le port d’Eilat est déserté depuis le début de la guerre. Le premier ministre Benyamin Netanyahou a demandé à son armée de « détruire les infrastructures » des rebelles. « Nous sommes déterminés à couper cette branche terroriste de l’“axe du mal” iranien », a-t-il martelé.

L’État hébreu a conduit plusieurs attaques sur des installations militaires houthistes au Yémen, sans faire cesser les nuisances des rebelles. « C’est une guerre à bas prix pour les Houthistes.

Dans un pays de montagnes, ils résident dans des villages nichés sur des pythons, inaccessibles, explique le chercheur Marc Lavergne. Pour attaquer Israël, ils n’ont besoin que de quelques rampes de lancement de missiles. Quand Israël les détruit, il y a peu de pertes humaines ».

Dans une note publiée par l’Institut international pour les études stratégiques (IISS) en octobre 2023, le chercheur spécialiste des questions de défense Fabian Hinz explique que Téhéran fournit aux Houthistes des roquettes, des missiles balistiques de longue portée, de croisière ou antinavires, ainsi que des drones Shahed. Preuve que l’armée israélienne se prépare à faire face à la poursuite des tirs, elle a commandé au groupe Israel Aerospace Industries des batteries d’interception de missiles de type Arrow 3, rapporte le Times of Israel.