Israël et le Hamas négocient une trêve de longue durée (Cyrille Louis – Le Figaro)

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L’État hébreu cherche à réduire la tension le long de la bande de Gaza. Les islamistes veulent desserrer l’étau du blocus.

Les pourparlers, menés dans le plus grand secret sous le patronage de l’Égypte, n’en alimentent pas moins une rumeur incessante. Le gouvernement israélien et le Hamas, engagés depuis trente ans dans une guerre sans merci, seraient sur le point de conclure une trêve durable. Ce n’est certes pas la première fois qu’on en parle, mais plusieurs indices donnent à penser que l’affaire, cette fois, est sérieuse. Selon la dixième chaîne de télévision israélienne, Benyamin Nétanyahou a effectué en mai dernier une discrète visite au Caire afin d’y évoquer les tensions dans la bande de Gaza avec le président Abdel Fattah al-Sissi. Plusieurs hauts responsables en exil du mouvement islamiste, dont certains figurent en bonne place sur la liste des cibles dont l’État hébreu souhaite se débarrasser, ont, depuis, été autorisés à se rendre à Gaza pour participer à une session exceptionnelle du bureau politique.

«Si l’occupant accepte de lever le siège, nous sommes prêts à envisager un cessez-le-feu de longue durée»

Ghazi Hamad, haut responsable du Hamas

Ce dialogue indirect a failli capoter à quatre reprises au moins à l’occasion d’embrasements frontaliers dont le dernier remonte à la nuit du 8 au 9 août. Mais l’empressement des deux parties à faire cesser les tirs de roquettes et les frappes aériennes après quelques heures seulement laisse penser qu’elles ne veulent pas d’une nouvelle guerre. Les dirigeants israéliens, bien que sous pression de l’extrême droite, admettent qu’ils cherchent à mettre un terme à l’ébullition permanente générée le long de la clôture par la «grande marche du retour». Les chefs du Hamas, affaiblis par douze années de blocus israélo-égyptien et de plus en plus isolés au plan régional, cherchent pour leur part à desserrer l’étau. Reste à savoir s’ils trouveront un terrain d’entente…

«La trêve est devenue une nécessité en raison de la situation humanitaire, plaide Ghazi Hamad, haut responsable du mouvement. Si l’occupant accepte de lever le siège, nous sommes prêts à envisager un cessez-le-feu de longue durée. Il n’y aura plus de tirs, plus d’engins explosifs et, à terme, plus de cerfs-volants incendiaires le long de la frontière. Mais avant d’en arriver là, il faudra que tous les points de passage vers Israël et l’Égypte soient ouverts, que l’approvisionnement en électricité et en eau soit notablement amélioré, que la zone de pêche soit étendue à 20 miles nautiques et que les restrictions à l’importation de certains matériaux soit levées.»

«Une prime à la violence»

Le premier ministre israélien, qu’un parfum d’élections anticipées incite à la prudence, ne l’entend pas tout à fait ainsi. S’il n’exclut pas d’assouplir les restrictions imposées à l’enclave, il estime que le Hamas doit d’abord restituer les dépouilles de deux soldats israéliens portés disparus durant la guerre de l’été 2014, ainsi que deux Israéliens détenus à Gaza. «Hors de question, rétorque Ghazi Hamad. Qu’Israël relâche la cinquantaine de prisonniers du Hamas arrêtés il y a quatre ans après avoir été libérés dans l’accord sur la libération (du soldat franco-israélien) Gilad Shalit et nous en parlerons…»

«À ce stade, Mahmoud Abbas refuse de signer un accord qui risquerait d’apporter un peu d’oxygène au Hamas»

Un diplomate européen

Le rôle de l’Autorité palestinienne, dont le président, Mahmoud Abbas, est fâché à mort avec le mouvement islamiste, est une autre inconnue. «Le fait qu’Israël accepte de négocier avec le Hamas après les incidents qui ont entouré la marche du retour constitue de son point de vue une prime inacceptable à la violence, observe un diplomate européen. À ce stade, il refuse de signer un accord qui risquerait d’apporter un peu d’oxygène au Hamas. Or il semble impensable que les pays prêts à financer des projets d’aide au développement à Gaza le fassent si l’Autorité n’est pas présente sur place pour garantir une certaine stabilité.»

Selon l’analyste Omar Chaaban, qui dirige le centre de réflexion Palthink, le plus probable est que les négociations accouchent d’un accord a minima visant à rétablir le cessez-le-feu de l’été 2014. «Le Hamas pourra toujours dire qu’il a obtenu la levée du blocus puisque personne ne sait exactement ce que cela signifie, dit-il. Mais il ne faut pas oublier qu’une telle trêve ne serait pas sans précédent. La dernière du genre, conclue à l’été 2008, n’avait tenu que trois mois.»