Comment les Etats-Unis ont demandé à la communauté internationale de soutenir leur plan israélo-palestinien (Georges Malbrunot – Le Figaro)

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DOCUMENT – Une note diplomatique américaine, adressée aux pays occidentaux et arabes que Le Figaro s’est procurée, détaille les éléments de langage que ceux-ci doivent utiliser.

Les consignes américaines sont claires. Pourtant, malgré un plan unanimement jugé favorable à Israël, elles ont plutôt été respectées par les pays auxquels elles s’adressaient. Le Figaro s’est procuré le document de quatre pages que Washington a transmis à ses alliés occidentaux et aux pays arabes, résumant le «plan de paix» israélo-palestinien de Donald Trump, présenté mardi 28 janvier à Washington. La note se termine par un paragraphe qui indique noir sur blanc ce que les pays destinataires doivent dire en réponse à la vision américaine pour «une paix entre Israéliens et Palestiniens».

Le paragraphe en anglais du document envoyé par les États-Unis.
Le paragraphe en anglais du document envoyé par les États-Unis. Le Figaro

Après avoir «appelé tous les pays à soutenir cette vision en encourageant Israéliens et Palestiniens à entrer immédiatement dans des discussions de bonne foi sur la base de cette vision», les Etats-Unis appellent «tous (ces) pays à publier des communiqués positifs, fondés sur le texte suivant: ‘Nous remercions le président Trump pour ses efforts en vue de faire avancer ce très ancien conflit. Nous avons étudié cette Vision et nous la considérons comme une proposition sérieuse, réaliste et de bonne foi pour régler les nombreux problèmes qui ne l’ont pas été pendant des décennies’».

Ensuite, le document américain «demande» aux pays destinataires de ses desiderata «d’appeler les directions israélienne et palestinienne à négocier sur la base de ce plan, sous les auspices des Etats-Unis, et de réaliser ainsi les progrès, qui permettront d’améliorer la vie des habitants de la région». Enfin, Washington réclame que la communauté internationale affirme que «le statu quo n’est pas acceptable, et c’est notre souhait que, fondé sur cette Vision, ce conflit puisse trouver un règlement longtemps recherché, conduisant à un Moyen-Orient plus pacifique».

Si l’on compare ces recommandations aux communiqués publiés par les pays arabes et les chancelleries occidentales peu après l’annonce du plan Trump, on constate de nombreuses similitudes de langage, soulignant – s’il en était encore besoin – l’influence de Washington sur ses alliés.

La France, par exemple, n’a certes pas remercié Donald Trump, comme il lui était demandé, mais elle a «salué», comme beaucoup d’autres pays, ce plan, même si Emmanuel Macron a confié mercredi 29 janvier au Figaro qu’il le trouvait inapplicable.

En Europe, la Grande-Bretagne a été la plus «suiviste», le premier ministre Boris Johnson allant jusqu’à reprendre l’expression américaine de «proposition sérieuse» pour qualifier le plan Trump.

Consignes américaines

Parmi les pays arabes, l’Egypte, premier pays à avoir signé la paix avec Israël et important bénéficiaire de l’aide financière américaine, a, dans la foulée de Washington, appelé «les deux parties concernées à un examen attentif et approfondi de la vision américaine (…) et à ouvrir des voies de dialogue, sous les auspices des Etats-Unis, pour une reprise des négociations».

Collant quasiment au narratif américain, les Emirats arabes unis, allié des Etats-Unis dans le Golfe, ont estimé que le plan Trump est «un important point de départ pour un retour à la table des négociations», selon un tweet de son ambassadeur aux Etats-Unis, Youssef Oteiba, l’un des rares ambassadeurs arabes avec l’Omanais et le Bahreïni à être présent à la cérémonie à la Maison-Blanche en présence du premier ministre israélien Benjamin Nétanyahou. «Les Emirats apprécient les efforts persistants» des Etats-Unis, a-t-il ajouté, faisant encore écho aux recommandations américaines.

Enfin, tout en «appréciant» les efforts de son allié américain, le roi Salman d’Arabie saoudite a semblé peu réceptif aux consignes américaines, appelant au téléphone le leader palestinien Mahmoud Abbas pour lui rappeler son soutien «inébranlable». Le Qatar a également campé sur une ligne attentiste.

Selon un diplomate à Paris, qui nous a remis cette note, les Etats-Unis envoient assez régulièrement ce type de documents pour que la communauté internationale soutienne ses efforts. «Quand on a une réunion de la Ligue arabe, comme celle qui a lieu ce week-end au Caire pour examiner le plan Trump, confie de son côté un diplomate arabe en poste à Paris, un diplomate américain débarque au ministère des Affaires étrangères chez nous pour dire comment on doit réagir». Ces pressions, cette fois-ci, n’ont visiblement pas été suivies d’effet. Réunis samedi dans la capitale égyptienne, les ministres des Affaires étrangères des pays arabes ont rejeté le plan Trump. Cet appel pourrait cependant rester lettre morte.

Rejeté par les Palestiniens, le plan de paix américain accorde de nombreuses garanties à Israël qui a reçu le feu vert pour annexer les colonies en Cisjordanie et la vallée du Jourdain. Il n’exclut pas la création d’un état palestinien, mais il serait mité de colonies et ne s’étendrait pas sur plus de 70% de la Cisjordanie, avec un faubourg de Jérusalem-Est, comme capitale de cet improbable Etat.