Samuel Paty : deux ans après, rien n’a changé

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Bonjour Arié Bensemhoun, vous revenez aujourd’hui sur l’assassinat de Samuel Paty qui a donné lieu à une série de commémorations le weekend dernier ?

En effet. Dimanche 16 octobre marquait les deux ans de la mort de Samuel Paty, le professeur d’histoire-géographie de Conflans-Sainte-Honorine décapité pour avoir parlé des caricatures de Mahomet dans un de ses cours. Deux ans déjà, et rien ne semble avoir changé.

Samuel Paty, a été souillé pre-mortem et post-mortem, accusé d’islamophobie et de racisme, y compris par certains de ses collègues, jusqu’à être abandonné par sa hiérarchie. Ces derniers jours, un professeur du Haut-Rhin a été menacé de mort par l’oncle de l’un de ses élèves. Dans l’Essonne, un professeur d’histoire-géographie a reçu une lettre anonyme antisémite menaçant de lui faire « une Samuel Paty ». Ces dérives coïncident avec la confirmation, par le ministère de l’Éducation, de la recrudescence des atteintes à la laïcité dans les établissements scolaires. 904 signalements ont été effectués au deuxième trimestre 2022, contre 636 au premier, en hausse de 40%. Plus de la moitié de ces alertes concernent le port de signes et tenues religieuses.

Voyez-vous une hypocrisie dans les hommages qui lui sont rendus?

Absolument. La récupération politique qui en est faite par ses fossoyeurs est absolument inacceptable…

Vous faites allusion à la Nupes ?

Oui… Si certains responsables de gauche prétendent défendre Samuel Paty, ils ne peuvent décemment nier leur complicité coupable dans la montée de l’islamisme en France. Par électoralisme, clientélisme, lâcheté ou complaisance, nombre d’entre eux ont choisi d’essentialiser les musulmans en donnant des gages aux plus radicaux d’entre eux. Le « palestinisme » en est la parfaite illustration. Tout récemment, Philippe Martinez, secrétaire général d la CGT se targuait d’avoir échappé aux balles de l’armée israélienne, non sans provoquer une certaine hilarité sur les réseaux sociaux. Que faisait donc cette figure du syndicalisme à Naplouse alors que la France traverse une crise sociale importante qui devrait être son unique objet de préoccupation ? La réponse est simple : les élections syndicales se tiennent au mois de décembre et il faut donner des gages à une partie de son électorat…

Autre symptôme de cette complicité coupable avec l’islamisme, l’invocation systématique de l’islamophobie à la moindre critique de l’islam. Rappelons-nous du défilé avec le CCIF pour dénoncer l’islamophobie d’État à l’occasion duquel Jean-Luc Mélenchon a laissé entendre que les assassinats commis par Mohamed Merah sont le fruit d’un complot ;  les compromissions régulières du maire de Grenoble Eric Piolle sur le port des burkinis dans les piscines ; l’éloge du voile par des personnalités comme Sandrine Rousseau qui y voient un « embellissement », ou encore les affirmations de  Clémentine Autain dans l’affaire Taha Bouhafs selon lesquelles il renonçait à sa candidature en raison d’attaques racistes alors que son comportement avec les femmes est à l’origine de son éviction….

Au sein de la Nupes, personne n’a la conscience tranquille. Selon l’Ifop, Jean-Luc Mélenchon a obtenu 69% des voix des musulmans français au premier tour de la présidentielle…

Comment expliquez-vous cette inaction apparente ?

Nous sommes dans une guerre idéologique où la peur et la lâcheté triomphent. Nombreux sont les enseignants qui s’auto-censurent et préfèrent ne plus enseigner la laïcité pour préserver leur intégrité physique. Du reste, l’Education nationale peine à recruter de nouveaux professeurs. L’islamisme politique continue de s’infiltrer dans les établissements. Le ministre de l’Éducation nationale Pap Ndiaye a reconnu dans un entretien récemment accordé au Monde « une vague de port de tenues pouvant être considérées comme religieuses notamment les abayas, les kamis ou les bandanas« .

Quels sont les leviers d’actions selon vous ?

L’État doit se montrer intransigeant contre tous ceux qui s’en prennent aux valeurs républicaines. Il est urgent de sortir du déni. D’abord en rappelant avec fermeté les principes de liberté, d’égalité, de fraternité, de laïcité sur lesquels est bâtie notre école publique, qui doit être imperméable à toutes les pressions et intimidations religieuses ou politiques.

Ensuite en soutenant coûte que coûte les professeurs quand ils sont menacés ou attaqués. Mais cela engage aussi toute la société, citoyens, acteurs institutionnels ou associatifs qui doivent se dresser à l’unisson pour défendre l’école.

C’est dans cette perspective qu’ELNET organise chaque année son sommet européen sur la radicalisation islamiste et la menace terroriste qui réunit tous les acteurs politiques et civils engagés dans la lutte contre ce fléau. Nous recevons également cette semaine l’organisation israélienne IMPACT, qui sensibilise les décideurs politiques et l’opinion publique sur la haine promue dans les manuels scolaires palestiniens. La tâche est rude mais nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour que la mémoire de Samuel Paty soit uniquement invoquée pour promouvoir l’universalisme.