En Irak, François Hollande profite pour la dernière fois de son uniforme de chef des armées

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Par le Monde – Marc Semo


A Bagdad et Erbil, le chef de l’Etat a assuré les Irakiens du soutien de la France face à l’organisation Etat islamique. La victoire à Mossoul est « une question de semaines », veut-il croire.


La crête rocailleuse domine la plaine de Ninive et au fond, à quinze kilomètres à peine, on devine, noyée dans la brume, la ville de Mossoul. « C’est la poussière de la bataille », explique le président du Kurdistan irakien, Massoud Barzani, lundi 2 janvier, à François Hollande. Depuis ce poste avancé des peshmergas – les combattants kurdes –, le président français scrute le paysage à la jumelle.

Avec le ministre de la défense, Jean-Yves Le Drian, il regarde une carte d’état-major que commente le chef kurde. Il est là, aussi, voire d’abord, pour la photo. La mise en scène est parfaite dans la lumière frisante d’un après-midi finissant. « La bataille de Mossoul est en train d’être gagnée, c’est une question de semaines et le plus tôt sera le mieux », avait affirmé, quelques heures auparavant, François Hollande, dans une conférence de presse commune à Bagdad avec le premier ministre irakien. Haïdar Al-Abadi, optimiste, assurait également : « Nous sommes en train de couper la tête au serpent. »

Il ne se représente plus et se sent libéré des contingences politiques. François Hollande pense surtout à son image et sa place dans l’histoire au travers de son bilan. Ce voyage du 2 janvier en Irak est pourtant aussi une tournée d’adieu aux popotes pour un président qui a adoré être aussi le chef des armées.

La priorité ? La lutte contre le djihadisme

Mi-janvier, lors du sommet Afrique-France à Bamako, il rencontrera les militaires français engagés au Mali. Ces deux opérations au Sahel et au Levant sont d’incontestables succès à mettre à l’actif de son quinquennat. Il y a un peu plus de deux ans, alors que les djihadistes de l’organisation Etat islamique étaient aux portes de Bagdad et d’Erbil, il avait été en septembre 2014 le premier chef d’Etat occidental à se rendre dans la capitale irakienne et dans celle de la région kurde, peu après le début de l’intervention de la coalition internationale. Aujourd’hui, l’EI est en retrait sur tous les fronts, et Mossoul, la capitale de son califat autoproclamé, est assiégée par les forces irakiennes et kurdes aidées par l’aviation de la coalition.

Cette visite vise avant tout à affirmer le soutien de Paris aux autorités irakiennes, aussi bien le président Fouad Massoum, Kurde, que le premier ministre chiite et le président du Parlement, Salim Al-Jobouri, sunnite. Dans la capitale de la région kurde, il a rencontré le président Massoud Barzani. La victoire contre l’EI ne sera durable que si l’Irak arrive à mettre sur pied une gouvernance inclusive respectant toute la mosaïque ethnique et confessionnelle du pays.

Mais, dans l’immédiat, la lutte contre le djihadisme reste la priorité. « Agir contre le terrorisme en Irak, c’est prévenir des actes terroristes sur notre propre sol », a assuré François Hollande, affirmant que « dans le cadre de la coalition nous aidons les forces irakiennes par l’appui, le conseil, l’intervention ». La France est le second contributeur de la coalition, mais très loin derrière les Etats- Unis.

 « Lutte longue »

L’opération Chammal – un vent du désert – mobilise aujourd’hui quelque 1 200 militaires français. Il y a l’aviation, qui a mené depuis le début un millier de frappes, détruisant plus de 1 700 objectifs en Irak et en Syrie. Mais celles-ci ne représentent qu’une infime partie – autour de 3 % – de l’ensemble, mené pour l’essentiel par les Etats-Unis. Il y a l’artillerie, avec quatre canons Caesar longue portée déployés près de Mossoul. Mais surtout la formation, dont la task force Narvik, une quarantaine d’hommes, qui conseillent aux côtés des Américains et d’autres pays de l’OTAN les forces spéciales irakiennes de l’Iraqi Counter Terrorism Service, engagées en première ligne à Mossoul.

« Le combat en zone urbaine prend du temps, d’autant que nous voulons prendre en compte la population civile. Et la progression est lente, car nous ne voulons pas laisser des îlots de résistance derrière nous », explique le capitaine Niels, l’un des formateurs. C’est une volonté de ménager l’avenir, alors même que l’équation de l’avenir de Mossoul, la grande ville sunnite du nord d’un pays majoritairement chiite, reste toujours aussi complexe.

De nombreux jihadistes restent retranchés dans la ville, dont de nombreux combattants étrangers et une soixantaine de Français. « Nous ferons en sorte qu’ils soient mis hors d’état de nuire ; s’ils sont pris par les Irakiens, ils seront condamnés par la justice irakienne, et par la justice française s’ils reviennent », a expliqué le président français.

Le chef de l’Etat avait commencé sa visite à Bagdad, avec Narvik. Il l’a achevé à Erbil, devant les forces spéciales françaises qui aident les peshmergas. « Il faut regarder maintenant au-delà de Mossoul. Ce sera une lutte longue pour détruire l’Etat islamique, mais elle sera victorieuse », a lancé M. Hollande.