Le Hamas a confirmé ce mardi examiner le plan américain pour Gaza, présenté lundi soir. Avec une gouvernance divisée en plusieurs niveaux, l’organisation palestinienne a déclaré avoir besoin de « plusieurs jours » pour répondre. Donald Trump lui en laisse « trois ou quatre ».
Par Louis Valleau – Le 30 septembre 2025 à 16h05
La balle est désormais dans le camp des dirigeants du Hamas, du moins ce qu’il en reste. Après la présentation en 20 points du plan américain pour Gaza par le président américain Donald Trump, l’organisation palestinienne doit donner sa réponse. Désarmement, libération des otages, gouvernance par intérim… Qu’en pense le Hamas ? Pour l’heure, pas de réponse officielle mais ses négociateurs ont promis dès lundi soir d’examiner « de bonne foi » cette proposition, après que les médiateurs qatari et égyptien leur ont remis le plan.
S’ils venaient à l’accepter, le projet américain prévoit une démilitarisation de la bande de Gaza et d’en « finir avec les capacités militaires du Hamas, avec effet immédiat ». Autrement dit : une sorte de disparition de l’organisation qui contrôle l’enclave palestinienne depuis 2007. S’ils le refusaient, le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou a d’ores et déjà promis de « finir le travail » sur le terrain. Pression maximale donc.
Un conseil de direction à 5
Depuis le début de la guerre, Israël n’a eu de cesse d’éliminer des dirigeants du Hamas ou a minima de les cibler, comme à Doha (Qatar) le 9 septembre. C’est le négociateur en chef du Hamas Khalil al-Hayya qui était alors visé. Ce dernier, présenté par plusieurs médias comme une figure centrale du mouvement et la plus influente à l’étranger, a survécu.
Aujourd’hui, la gouvernance politique du Hamas possède cinq têtes, toutes vivantes à l’étranger, selon Reuters. Khalil al-Hayya donc, mais aussi Khaled Mechaal, un membre fondateur du Hamas, Muhammad Ismail Darwish — qui serait à la tête de ce bureau politique —, Nizar Awadallah, qui aurait dirigé le Hamas à Gaza en 2006, et Zaher Jabarin, le représentant du Hamas en Cisjordanie occupée.
« Il y a une forme de collégialité décisionnelle, mais tous ne sont pas sur la même ligne », observe auprès du Parisien David Rigoulet-Roze, chercheur à l’Ifas (Institut français d’analyse stratégique).
Sur le terrain, le plus haut dirigeant du Hamas à Gaza se nomme Izz al-Din al-Haddad. Il est en place depuis l’élimination des deux frères Sinouar en octobre 2024 et en mai 2025. « C’est lui qui a la main sur les opérations militaires », pointe David Rigoulet-Roze.
Pour Didier Billion, directeur adjoint de l’Iris (Institut de relations internationales et stratégiques), « la direction militaire » du mouvement est toutefois « de plus en plus autonome » par rapport à la gouvernance politique. Pourquoi ? « Car les communications sont de plus en plus complexes » entre Gaza et l’extérieur, estime ce spécialiste.
Mais parmi ces différentes autorités, laquelle a le dernier mot ? Sur l’accord de paix avec Israël, d’une importance majeure, les spécialistes interrogés s’accordent à dire qu’il faudra un consensus, au moins a minima, entre les différentes branches de l’organisation. « Il y a une opacité sur le mode de prise de décision du Hamas, cela a pu expliquer des échecs par le passé et des déclarations contradictoires sur les négociations », décrit David Rigoulet-Roze.
Le poids du Qatar et de la Turquie ?
Derrière ces questions internes se cachent aussi des enjeux régionaux : en témoigne la réunion tripartite prévue ce mardi soir entre le Hamas, le Qatar et la Turquie. Doha s’est montré optimiste, qualifiant le projet américain de « plan global ». « Ce sont les deux États qui ont le plus de leviers, les deux seuls qui peuvent vraiment peser sur les décisions du Hamas », analyse Laure Foucher, maître de recherches à la Fondation pour la recherche stratégique (FRS). Les dirigeants du Hamas y résident et il existe des liens économiques entre ces deux pays et le mouvement palestinien.
Face à tous ces éléments, la position du Hamas est donc plus que complexe. D’un côté, « accepter reviendrait à une capitulation », estime Didier Billion. Mais de l’autre, certains pays — dont le Qatar et la Turquie — pourraient mettre la pression sur l’entité palestinienne pour qu’elle consente à mettre fin à la guerre. « Le Hamas n’aura pas le choix si les Qataris et les Turcs le poussent. Sans ce canal de négociation, il est enfermé », décrypte Laure Foucher.
Selon une source palestinienne proche du Hamas citée par l’AFP, les « consultations » autour de ce plan pourraient « durer plusieurs jours ». Donald Trump laisse, lui, « trois ou quatre jours » pour avoir une réponse. Et n’hésite pas à menacer : en cas de retour négatif, le Hamas « expiera en enfer », assure le président américain.